Il nous faut peu de mots pour exprimer l’essentiel.
Paul Eluard
Poète français
Sur ces belles paroles, allons à l’essentiel de cette œuvre emblématique des bibliothèques françaises : Capitale de la douleur de Paul Eluard. Découvre avec nous ce recueil de poèmes doux et tragiques et partons ensemble dans son analyse ! 🖊️
Titre | Capitale de la douleur |
---|---|
Auteur | Paul Eluard |
Date | 1926 |
Genre | Poésie |
Nombre de pages | 240 |
Nombre de poèmes | 200 |
Capitale de la douleur : présentation générale 📖
Résumé
Publié en 1926, Capitale de la douleur est un recueil de poèmes surréaliste écrit par Paul Eluard. L’ouvrage est composé d’environ 200 textes, dont la plupart ont déjà été publiés en amont. Dans ses vers, l’auteur parle principalement de sa compagne. Une relation qui le rend très malheureux puisqu’elle ne l’aime pas (amour à sens unique tu connais 🥲).
Les thématiques qu’il emploie se tournent essentiellement vers l’amour et la souffrance. Il exploite de nombreuses métaphores sur la saveur amère de ses sentiments. Il revient sur les éléments de son passé, ceux de son présent et ses rêves amoureux inaccessibles. 😕
Biographie de l’auteur
🪶 Paul Eluard est en réalité un nom de plume. Le poète français est né Eugène Grindel à Paris en 1895. Il est également connu sous les pseudonymes Didier Desroches et Brun.
🪶 À 16 ans, atteint de la tuberculose, il fait un séjour dans un sanatorium. C’est là-bas qu’il rencontre Helena Diakonova, qu’il surnomme Gala. C’est sa muse, elle inspire ses écrits.
🪶 De 1914 à 1918, il est mobilisé pour la Première Guerre mondiale comme infirmier militaire. Lors de la victoire, il remet en question le non-sens du monde qui l’entoure : c’est le mouvement dada, celui qui le mène au surréalisme.
🪶 Pilier du mouvement surréaliste, il ouvre la voie à une action artistique engagée auprès du Parti communiste.
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👉 Quatre sections de vie pour quatre parties
📍 Répétitions
La première partie est composée de 35 textes. La moitié d’entre eux ont déjà été publiés par l’auteur lors d’essais de publication de courts recueils. Ils sont liés à la culture, des tableaux et autres œuvres d’art, notamment ceux de Max Ernst. Ces poèmes viennent apporter une dose de douceur et d’explications métaphoriques aux peintures. Ils émergent durant son adolescence, le sanatorium, ses études supérieures jusqu’à sa mobilisation en 1914.
📍 Mourir, ne pas mourir
Dans cette seconde partie (22 textes) on y retrouve les traces de la guerre. Des écrits aux allures de lettres dans lesquels il décrit sa femme comme pour garder à vif dans son esprit l’absence de celle qu’il aime. Puis, le drame et l’horreur de 14-18, la cruauté de l’homme et son absurdité.
📍 Les petits justes
Cette partie contient 11 petits écrits. Ici, il expérimente l’art poétique et ses multiples formes. Alexandrin, décasyllabe, hendécasyllabe, prose, rime, etc. C’est dans cette courte partie qu’il s’essaie pour finalement ne pas choisir un seul style d’écriture.
📍 Nouveaux poèmes
Avant de conclure son recueil, Paul Eluard fait une fugue de plusieurs mois. Il avait besoin de renouveau, de découvrir le monde, de se retrouver. C’est à son retour qu’il écrit plus de 30 écrits, sur différents sujets et les différentes personnes qui ont composé sa vie. À Gala, sur l’absence, à son ami d’enfance, sur ses rêves ou encore ses espoirs, son seul vœu : rendre le monde meilleur et savoir se contenter des petites choses du quotidien.
À lire aussi
✅ Si tu souhaites découvrir une nouvelle lecture, on t’invite à lire Une charogne de Charles Baudelaire dans son livre de poème Les Fleurs du mal.
Capitale de la douleur : la place du surréalisme ✨
Dans ses vers, Paul Eluard utilise le surréalisme pour définir ce qu’il voit, ressent et vit. Un peu comme un journal intime mais avec plus de charme ! Son écriture repose sur le refus d’une utilisation rationnelle des mots dans la poésie. Il vient décrire les traits de sa compagne, ou encore les femmes qu’il a pu rencontrer, avec une précision qui déplait pour l’époque –le coquin.
C’est par son choix assez libre qu’il se démarque de ses confrères écrivains surréalistes. Eux, préfèrent la spontanéité de l’imaginaire, qui peut s’exprimer librement.
Une femme au cœur pâle
Met la nuit dans ses habits.
L’amour a découvert la nuit
Sur ses seins impalpables.
Paul Eluard
Au cœur de mon amour
Il en va de même avec sa souffrance. Pourquoi l’adoucir ? Pourquoi ne pas la montrer telle qu’il la ressent ? Il adopte le surréalisme pour parler de sa peine, face à l’affection qu’il porte à sa femme mais qui n’est qu’à sens unique. Il l’utilise également pour parler de la souffrance et de la violence de la guerre. C’est pour lui l’occasion de définir les choses telles qu’elles ont réellement existé pour les maintenir vivantes et réelles.
L’homme s’enfuit, le cheval tombe,
La porte ne peut pas s’ouvrir,
L’oiseau se tait, creusez sa tombe,
Le silence le fait mourir.
Paul Eluard
Le jeu de construction
Bref, le surréalisme permet de pouvoir identifier ses maux et de les interpréter de manière forte et unique dans son ouvrage. L’emploi de la verve surréalisme est aussi couramment utilisé par l’écrivain pour mettre en scène l’émergence de la parole et les marques textuelles. Il en tire profit dans sa technique de rédaction. La langue poétique (la syntaxe et la mise en image) et le désordre de ses pensées pour créer un univers de romance et de destruction qui viennent s’unir pour mieux faire vivre ses émotions.
🕒 Une chronologie marquée par les répétitions
Pour un œil ordinaire, le choix de répéter le titre d’un poème à plusieurs reprises n’est que pure fantaisie de poète mais pour un œil aguerri, les répétitions sont bien un choix de cheminement dans sa réflexion. C’est comme si, paradoxalement à ce qu’il vit, il commence par un texte, une idée ou un événement sans lui donner de contexte.
Plus tard, il vient réfléchir à la problématique, il pose sa réflexion sur le sujet et des pistes de compréhension pour le lecteur. Enfin, il vient une dernière fois répéter l’idée pour l’organiser et la déchiffrer, comme si ces répétitions marquaient la temporalité des événements.
D’ailleurs, Répétitions est aussi le nom du premier chapitre. Elles représentent la recherche verbale, les différentes formes que peuvent prendre ses écrits. Cette forme de poésie vient l’aider à trouver sa propre signature littéraire, celle qu’on lui connait aujourd’hui ! 🤩
L’exemple le plus vindicatif est sûrement Suite 👇
Pour l’éclat du jour des bonheurs en l’air
Pour vivre aisément des goûts des couleurs
Pour se régaler des amours pour rire
Pour ouvrir les yeux au dernier instant
Elle a toutes les complaisances.
Paul Eluard
Suite
Dans ce poème, Paul Eluard emploie une rythmique bien particulière. “Pour” est répété en chaque début de phrase (c’est une anaphore 😏). Les vers, eux, sont semblables, tous ont une idée commune : le bonheur est simple dans le quotidien qui nous entoure. Si l’idée est bonne, la réponse n’est pas claire. À quoi rime ce bonheur ? 🧐
C’est ici que survient l’impensable : et si la réponse venait plus tard ? Dans le recueil, un autre poème avec le même nom apparaît, précédé de celui qui s’intitule Porte ouverte. Il donne l’impression que cette “porte ouverte” vient donner la suite qui permet aux lecteurs de mieux comprendre le poème, dans son intégralité. 🤗
La vie est bien aimable
Venez à moi, si je vais à vous c’est un jeu
Les anges des bouquets dont les fleurs changent de couleur.
Porte ouverte, p.19
–
Dormir, la lune dans un œil et le soleil dans l’autre,
Un amour dans la bouche, un bel oiseau dans les cheveux,
Parée comme les champs, les bois, les routes et la mer,
Belle et parée comme le tour du monde.
Fuis à travers le paysage,
Parmi les branches de fumée et tous les fruits du vent,
Jambes de pierre aux bas de sable,
Prise à la taille, à tous les muscles de rivière,
Et le dernier souci sur un visage transformé.
Suite, p.21
En ce sens, les répétitions qu’emploie l’auteur donnent bien une chronologie des événements : la situation, la réflexion, la leçon. On peut comparer ce choix à une de nos situations du quotidien : on s’énerve, on réfléchit, on se calme, c’est le même principe !
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✒️ À la recherche d’un style poétique
Dans son livre, Paul Eluard s’essaie aux différentes formes poétiques.
📍 En rime et en prose, lequel choisir ?
- Rimes suivies : AABB
A l’ombre des arbres
Comme au temps des miracles,
Au milieu des hommes,
Comme la plus belle femme
Sans regret, sans honte,
J’ai quitté le monde.
Entre autres, p.61
- Rimes croisées : ABAB
Un papillon sur une branche
Attend patiemment l’hiver,
Son cœur est lourd, la branche penche,
La branche se plie comme un ver.
Extrait Le jeu de construction, p.60
- Rimes embrassées : ABBA
Une femme au cœur pâle
Met la nuit dans ses habits.
L’amour a découvert la nuit
Sur ses seins impalpables.
Au cœur de mon amour, p.53
- Prose
Tourne sans reflets aux courbes sans sourires des ombres à moustaches, enregistre les murmures de la vitesse, la terreur minuscule, cherche sous des cendres froides les plus petits oiseaux, ce qui ne ferment jamais leurs ailes, résiste au vent.
ARP, p.128
Comme tu peux le constater, l’auteur s’est testé à toutes les formes de rimes et de styles poétiques. L’auteur est aussi un grand adepte des figures de style dont l’anaphore et la métaphore qui reviennent particulièrement souvent.
📍 Les figures de style adoptés par Capitale de la douleur
- L’anaphore.
L’anaphore est une répétition d’un mot, ou groupe de mots, en début de phrase ou de paragraphe. On l’aperçoit dans Suite, page 14, comme vu précédemment.
Elle apparaît également sur les écrits qui suivent, comme dans Au plus près de nous, page 18 :
Courir et courir délivrance
Et tout trouver et tout ramasser
Délivrance et richesse
Courir aussi vite que le fil casse
Au bruit que fait un grand oiseau
Un drapeau toujours dépassé.
- La métaphore.
La métaphore est le fait de désigner une chose par une autre. Cette technique est couramment utilisée dans la littérature, encore plus dans la poésie.
Ses yeux ont tout un ciel de larmes
Ni ses paupières, ni ses mains
Ne font une nuit suffisante
Pour que sa douleur s’y cache.
Entre peu d’autres, p.122
NB: Ses yeux ont tout un ciel de larmes ⇾ est une métaphore pour dire qu’elle pleure.
La métaphore aide les écrivains à dépeindre une réalité plus douce en usant des mots pour décrire une situation plus belle et imagée qu’elle ne l’est réellement.
📖 Pour résumer
Dans le recueil de poésie, il n’y a pas de réel style poétique abordé. Au contraire, l’auteur s’amuse à essayer tous les styles, ce qui crée une diversité des poèmes qui plaît à lire. Entre autres, l’utilisation des figures de style lui permet aussi d’approfondir, d’embellir ou encore de dégrader une image qu’il dépeint dans un texte. Elles permettent de varier les plaisirs dans l’écriture et, aux lecteurs, de changer de rythme pour découvrir de nouveaux écrits. La pluridisciplinarité de l’écrivain le guide à offrir un livre original et complexe sur ses sentiments et l’incompréhension du monde qui l’entoure.
Capitale de la douleur dans un film 🎥
Dans le film Aphaville : une étrange aventure de Lemmy Caution de Jean-Luc Godard, Lemmy est un jeune agent secret qui a pour mission de détruire son ennemi et sa création. Pour ça, il se fait passer pour un journaliste et est pris en charge par la fille de son ennemi, la belle Natacha. Son but est de la faire passer dans son camp pour faciliter sa mission. Pour ça, Lemmy ne va pas lésiner sur les moyens, il lui parle de la vie à l’extérieur de sa société, d’amour et lui récite même des poèmes, ceux de Paul Eluard.
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👉 Un titre pour deux capitales
Qu’est-ce qu’un mot polysémique ? C’est le fait qu’un mot ait plusieurs sens, plusieurs significations. Ici, on parle de polysémie, car Capitale de la douleur ramène à deux éléments de la vie de l’auteur.
📍 Il fait d’abord référence à Paris assiégé durant la Grande Guerre et aux souffrances liées à cette dernière. L’auteur fait d’ailleurs référence à cette dernière dans plusieurs poèmes. L’ouvrage devient alors l’arme du poète pour lutter contre les maux de la guerre. En ce sens, Paris devient capitale de la poésie. La ville représente toute la souffrance et la douleur des combats qu’il a vécues.
📍 Dans un second temps, il fait référence à Gala, capitale de l’amour aux yeux de l’écrivain. Une dévotion à sens unique dont il en ressort brisé. C’est donc une deuxième capitale de douleur, une affection vide de sens pour une femme qui ne se préoccupe plus de lui. En ce sens, il se retrouve seul, malheureux et l’âme en peine. Sentiment qu’il aborde aussi de nombreuses fois dans le livre.
💡 Anecdote
Le nom original du recueil était L’art d’être malheureux. Paul Eluard décide de le changer au dernier moment, juste avant l’impression des premiers exemplaires. Capitale de la douleur voit donc le jour de manière peu conventionnelle.
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👉 Trois thématiques de la conquête amoureuse
Si les douleurs et l’incompréhension liée à la guerre sont des sujets qu’aborde l’auteur, ce n’est qu’une thématique partielle. La grande majorité des thèmes abordés dans le livre sont au nombre de trois.
📍 L’amour est le fil conducteur du livre : celui pour sa muse, celui pour l’écriture et, par-dessus tout, celui pour les petites choses du quotidien comme le soleil, le bonheur, un rire, une douce mélodie, la pluie qui donne naissance aux fleurs et tant d’autres éléments qui au fil du temps perdent de la valeur pour le commun des mortels.
📍 La sexualité est abordée lorsque l’auteur parle de sa muse. Il décrit avec sensualité les courbes de son corps. Puis, lorsque celle-ci se lasse de lui, il se tourne vers les filles de joie. C’est avec délicatesse qu’il parle des contacts physiques, de la tendresse des gestes, du corps-à-corps. Que calor! 🔥
Une couleur madame, une couleur monsieur,
Une aux seins, une aux cheveux,
La bouche des passions
Et si vous voyez rouge
La plus belle est à vos genoux.
Paul Eluard
IV
📍 Le désir se façonne grâce à l’amour pour sa femme, il la désire au plus haut point, d’un point de vue humain, émotionnel, physique et irréel. Le désir de reprendre son quotidien après la guerre, mais par-dessus tout le désir de vivre chaque jour comme le dernier -parce qu’on vient de loin pa la pa pa (merci Corneille -le chanteur, pas l’auteur-).
C’est ainsi que Capitale de la douleur prend vie, au milieu du brouhaha de sa vie et c’est ainsi que cette fiche de lecture se termine ! Pour ne pas te laisser sur ces notes un peu tristes, voici un de ces poèmes célèbre, La courbe de tes yeux. Poème compté avec douceur par le chanteur et comédien Maxime Bras sur son compte @nuitd’encre_ sur Instagram qui nous met le cœur en joie ! 🥰
FAQ ✅
Quelle est l’idée générale de Capitale de la douleur ?
« Capitale de la douleur » est un recueil de poèmes de Paul Éluard, figure emblématique du mouvement surréaliste. Le titre de l’œuvre illustre parfaitement l’idée générale du livre, mettant en lumière la douleur et le désespoir humain, mais aussi l’espoir et l’amour. L’œuvre est divisée en trois parties : « Douloureuse », « Désespérée », et « De l’amour ». Elles représentent respectivement la douleur, le désespoir et l’amour comme étant les trois « capitales » de l’existence humaine. Les poèmes explorent les aspects les plus profonds et parfois les plus sombres de l’expérience humaine.
Qu’est-ce que le surréalisme dans Capitale de la douleur ?
Le surréalisme est un mouvement artistique et littéraire qui cherche à exprimer la réalité de l’inconscient et des rêves, en opposition à la rationalité du monde réel. Dans « Capitale de la douleur », Éluard utilise des images surréalistes pour donner une expression à ses sentiments et à ses émotions. Il utilise des images et des métaphores qui semblent irrationnelles ou impossibles, comme un moyen de transmettre la vérité émotionnelle de ses expériences. Les poèmes défient souvent la logique et les conventions, reflétant la philosophie surréaliste de l’exploration de l’inconscient.
Pourquoi le titre de Capitale de la douleur ?
Le titre « Capitale de la douleur » est une métaphore de la souffrance humaine. C’est une façon d’exprimer l’idée que la douleur est une partie inévitable et centrale de l’expérience humaine, comme une « capitale » est le centre d’un pays ou d’une région. Éluard utilise ce titre pour souligner l’universalité de la douleur et de la souffrance, mais aussi pour indiquer que l’œuvre aborde des thèmes tels que l’amour et l’espoir, qui peuvent servir de contrepoids à la douleur.