La premiĂšre chose que tu as sĂ»rement remarquĂ©e et qui doit te plaire, câest que cet ouvrage est manifestement peu Ă©pais. Mais attention, ça ne veut pas pour autant dire quâil y a moins dâĂ©lĂ©ments intĂ©ressants Ă notifier, au contraire⊠Alors, nâattendons pas plus, câest parti pour lâanalyse des Sonnets de Louise LabĂ© ! đȘ¶
PrĂ©sentation de lâĆuvre de Louise LabĂ© Sonnets
Date de publication | 1555 |
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Genre | Poésie |
Forme | Sonnet (forme générale changeable de quatorze vers, principalement utilisés pour énoncer un sentiment amoureux), élégies |
Nombre de poĂšmes | 24 |
đĄ Le savais-tu ?
Les Sonnets sont composés de décasyllabes (vers qui contient 10 syllabes), typique de la Renaissance. Le systÚme de rime est généralement composé en ABBA ABBA CCD EED.
Dans le sonnet V par exemple, on retrouve ce systĂšme de rime :
A : Claire VĂ©nus, qui […] Cieux,
B : Entends ma voix […] chantera,
B : Tant que ta […] luira,
A : Son long travail […] ennuyeux.
A : Mon Ćil veillant […] mieux,
B : Et plus de […] jettera.
B : Mieux mon lit […] baignera,
A : De ses travaux […] yeux.
C : Donc des humains […] esprits
C : De doux repos […] Ă©pris.
D : Jâendure mal tant […] luit;
E : Et quand je […] cassĂ©e,
E : Et que me […] lassĂ©e,
D : Crier me faut […] nuit.
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Contexte dâĂ©criture đ°ïž
Le contexte dâĂ©criture dâune Ćuvre est rĂ©vĂ©lateur de nombreux dĂ©tails, et câest pour cette raison quâon va sây pencher.
đ Ici, Ă lâĂ©poque de Louise LabĂ©, les femmes poĂštes Ă©taient peu acceptĂ©es. Elle devient ainsi lâune des premiĂšres en France Ă faire entendre sa voix en se faisant publier et lire. La jeune femme est trĂšs cultivĂ©e puisquâelle a une bibliothĂšque fournie grĂące Ă la richesse de son mari, dans une pĂ©riode oĂč les livres sont pourtant rares et prĂ©cieux.
En France, au XVIá” siĂšcle, câest assez rare que ce soient les femmes qui sâexpriment sur leurs sentiments et que ce soit lâhomme lâobjet du dĂ©sir amoureux. Louise LabĂ© utilise donc les sonnets pour devenir lâinitiatrice de ce renversement de codes. â
Ă doux regards, ĂŽ yeux pleins de beautĂ© / Petits jardins pleins de fleurs amoureuses / OĂč sont dâAmour les flĂšches dangereuses, / Tant Ă vous voir mon Ćil sâest arrĂȘtĂ© !
Louise Labé
Poétesse
RĂ©sumĂ© Louise LabĂ© Sonnetsđ
đ Sonnet I Ă III et IV
Le premier sonnet expose dĂšs le dĂ©part le style dâĂ©criture et lâĂ©tat dâesprit de Louise LabĂ© avec son thĂšme favori : lâamouuur. đ
Elle fait aussi de nombreuses rĂ©fĂ©rences Ă des Ă©crivains ou poĂštes plus anciens, avec le hĂ©ros dâHomĂšre, Ulysse, ou bien encore en Ă©crivant en italien (seulement dans le 1á”Êł sonnet), tout comme PĂ©trarque, poĂšte du XIVá” siĂšcle.
Comme le veut le genre Ă©lĂ©giaque, les trois premiers poĂšmes sâadressent Ă lâamant de la jeune femme. Celle-ci est condamnĂ©e Ă une aliĂ©nation physique et mentale qui lâenferme dans un Ă©tat de mĂ©lancolie. âïž
Tant que mes yeux pourront larmes Ă©pandre / A lâheur passĂ©e avec toi regretter, / Et quâaux sanglots et soupirs rĂ©sister / Pourra ma voix, et un peu faire entendre ; / […] Et mon esprit en ce mortel sĂ©jour / Ne pouvant plus montrer signe dâamante.
Louise Labé
Poétesse
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Si tu ne sais pas encore ce quâest une Ă©lĂ©gie, on tâinvite Ă lire Les Amours de Ronsard, figure emblĂ©matique de cette forme poĂ©tique !
đ Sonnet VIII
đ Ce sonnet est certainement le plus connu de lâĆuvre de Louise LabĂ©, câest pourquoi lâon va un peu plus sây attarder !
đ DĂ©nommĂ© âle sonnet des antithĂšsesâ, il parle de lâamour, mais Ă©galement Ă lâinverse, de la souffrance dans lâamour. Il est inspirĂ© dâun poĂšme de PĂ©trarque, Canzoniere et par ailleurs de lâĆuvre de Sappho : ils sont similaires du point de vue des figures de style utilisĂ©es et de la composition. Ce sonnet suit plusieurs normes (par exemple le fait quâil soit composĂ© de 14 vers dont 2 quatrains et 2 tercets). Louise LabĂ© utilise ainsi le sonnet pour exprimer sa passion par le fait quâelle soit contrainte de suivre ces rĂšgles. Cela montre dâautant plus quâelle est soumise Ă lâamour.
1ïžâŁ La premiĂšre strophe du sonnet est un quatrain.
⥠Il dĂ©crit et oppose les grands ennuis et la joie que peuvent apporter lâamour. On peut constater de fortes oppositions : âJe vis, je meursâ, âje me brĂ»le et me noieâ, âtrop molle et trop dureâ. Câest un chaos des formes dâopposition entre le bonheur et le malheur.
đšïž Câest une expression personnelle quâĂ©met Louise LabĂ© dans ce poĂšme puisquâil y a une omniprĂ©sence de la premiĂšre personne. Il y a un fort sentiment de proximitĂ© avec le lecteur. Oui, câest normal, parce que tout le monde peut ressentir ça. đ€
NĂ©anmoins, il est important de noter quâil nây a pas de vĂ©ritable destinataire de cette douleur.
2ïžâŁ La deuxiĂšme strophe est Ă©galement un quatrain.
⥠Il y a toujours une description avec de trĂšs fortes oppositions âtourments, rires, pleursâ. On comprend ainsi que lâon est face Ă une femme malade qui se lamente.
â Mais lâĂ©vocation du sentiment est ici assez intĂ©ressante : elle lâamĂšne avec une certaine tradition PĂ©trarquiste, tout en Ă©tant originale grĂące Ă lâapparition de sensualitĂ© dans son texte. Lâamour devient plus physique puisquâon Ă©voque le sens du toucher.
3ïžâŁ La troisiĂšme strophe est un tercet.
â La rĂ©flexion quâelle Ă©met est vraiment inscrite dans lâesprit son Ă©poque. Tout dâabord, avec lâutilisation du prĂ©sent. La vision pessimiste de lâamour est aussi un grand marqueur de lâĂ©poque. Louise LabĂ© sâinterroge beaucoup sur son ressenti et se place comme une victime des jeux de lâamour, rĂ©sonnant ainsi avec le mouvement humaniste.
4ïžâŁ La derniĂšre strophe est (aussi) un tercet
… comme le souhaitent les rĂšgles propres Ă cette forme poĂ©tique !
đ Il conclut sur le caractĂšre complexe de lâĂ©motion amoureuse. Ainsi, lâauteure Ă©lĂšve sa voix en reprĂ©sentant bien le lyrisme amoureux de ce poĂšme.
Puis, quand je crois ma joie ĂȘtre certaine, / Et ĂȘtre en haut de mon dĂ©sirĂ© heur, / Il me remet en mon premier malheur.
Louise Labé
Poétesse
đ Sonnets XIV Ă XXIV
Louise LabĂ© Sonnets est une oeuvre qui montre Ă quel point lâamour est indispensable Ă la vie de tous. Elle Ă©voque sans dĂ©tours ce qui donne selon elle un sens Ă la vie. Elle conçoit le plaisir comme un sentiment que tous doivent vivre, sous peine dâĂȘtre rĂ©putĂ© barbare ou grossier.
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Louise LabĂ© Sonnets : analyse des enjeux principaux đ
La conception de lâamour et ses tourments đ
Selon les dires, Louise LabĂ© se sert de sa propre expĂ©rience pour parler de sa douleur. Elle a connu une rupture avec un certain Olivier de Magny qui lâa profondĂ©ment touchĂ©e et souhaite donc exprimer ce tourment de vive voix.
đš Il est important de comprendre que la souffrance est perçue comme une source bienfaitrice dans lâesprit commun du XVIá” siĂšcle.
Ses poĂšmes lui servent ainsi dâexutoire. Chacun sa maniĂšre de passer Ă autre chose⊠Ainsi, ce seraient les jeux de lâamour qui auraient, au grĂšs dâun parcours initiatique, amenĂ©s la jeune femme Ă devenir poĂšte.
đ CoĂŻncidence ou non, il est vrai que le sonnet est considĂ©rĂ© comme la forme par excellence pour parler dâamour.
Lâauteure ne parle pas seulement dâamour pour y exposer ses dĂ©boires : elle idĂ©alise ce sentiment. Elle le voit comme une chose belle, merveilleuse et enivrante. Lâamour permet le renouveau. đ±
Lâauteur voit donc en lâamour plusieurs conceptions qui Ă©voluent au fil du temps et des sentiments. En effet, la particularitĂ© du sentiment amoureux des Sonnets de Louise LabĂ© est le fait quâelle le voit comme une ambivalence : lâamour peut ĂȘtre source de joie ou de malheur, Ă©tant alors Ă la fois deux sentiments opposĂ©s. Comme si ce nâĂ©tait pas dĂ©jĂ assez compliquĂ© comme ça⊠đ„Č
Ainsi Amour inconstamment me mĂšne / Et, quand je pense avoir plus de douleur, / Sans y penser je me trouve hors de peine. / Puis, quand je crois ma joie ĂȘtre certaine, / Et ĂȘtre en haut de mon dĂ©sirĂ© heur, / Il me remet en mon premier malheur.
Louise Labé
Poétesse
Le mouvement humaniste đ€
Louise LabĂ© fait partie du mouvement littĂ©raire de lâhumanisme. Câest un mouvement qui a trouvĂ© un grand succĂšs durant la Renaissance, pĂ©riode de lâauteure française.
đ Lâhumanisme a de grandes caractĂ©ristiques, que lâon peut lier Ă Louise LabĂ© et ses Sonnets :
- le rejet de lâobscurantisme mĂ©diĂ©val
- la redĂ©couverte de la lecture antique â Louise LabĂ© sâappuie sur le poĂšme de Sappho, poĂ©tesse grecque qui dĂ©crit son attirance pour les jeunes femmes et suit lâinfluence de la doctrine philosophique de lâamour platonique, surtout par Platon
- l’Homme au cĆur des occupations â lâauteure insiste Ă©normĂ©ment sur les sentiments quâelle ressent et de ses relations avec les autres humains
- la connaissance du grec et du latin
- Ă lâĂ©chelle de la France, Lyon est une grande ville culturelle humaniste â Louise LabĂ© est dâailleurs nĂ©e dans cette ville et a Ă©tĂ© Ă©levĂ©e dans cette tradition.
đ De plus, Louise LabĂ© sâappuie aussi Ă©normĂ©ment sur les ouvrages et le style dâĂ©criture de PĂ©trarque, cĂ©lĂšbre auteur italien et lui-mĂȘme considĂ©rĂ© comme lâinitiateur du mouvement humaniste.
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Biographie Louise LabĂ© đ
Nom | Labé (née Charly) |
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PrĂ©nom | Louise (elle a plusieurs surnoms, dont celui de âla belle CordiĂšreâ, puisquâelle est fille et Ă©pouse de cordiers) |
Dates | 1524 Ă Lyon - 25 avril 1566 Ă Parcieux-en-Dombes |
Métier | Poétesse |
Sujets de prĂ©dilection et thĂšmes principaux | Lâamour (bien Ă©videmment), la tristesse, la souffrance et le danger |
Autres Ćuvres famous | DĂ©bat de folie et dâamour (1555) ĂpĂźtre dĂ©dicatoire Ă ClĂ©mence de Bourges (1555) ĂlĂ©gies (1555) |
Ătudes | Louise LabĂ© est Ă©duquĂ©e comme une fille de bonne famille alors quâelle vient plutĂŽt dâun milieu modeste. Elle est trĂšs cultivĂ©e : elle maĂźtrise le latin, le grec, lâespagnol, lâitalien, chante, compose, sâaccompagne au luth, pratique lâĂ©quitation et sâinitie au maniement des armes. |
đĄ Pour info
On connaĂźt si peu dâĂ©lĂ©ments de la vie de cette Française, que certains historiens de la littĂ©rature de la Renaissance Ă©mettent lâhypothĂšse que lâauteure ne serait pas rĂ©elle, mais plutĂŽt une âcrĂ©ature de papierâ.
Pour aller plus loin đš
Les Ćuvres poĂ©tiques de Louise LabĂ© ont beaucoup fait parler dâelles par leurs franches libertĂ©s dâesprit et leurs postures proto-fĂ©ministe (lâancĂȘtre du fĂ©minisme moderne). Dâailleurs, certains auteurs reprennent certaines idĂ©es de ces poĂšmes, tout comme Jean de la Fontaine. Il trouve dans Le DĂ©bat de Folie et dâAmour le sujet pour sa fable LâAmour et la Folie.
On espĂšre que, grĂące Ă cette fiche de lecture, tu en as appris un peu plus sur lâamour poĂ©tique ! Ă bientĂŽt pour de nouvelles analyses littĂ©raires ! đ
FAQ â
Quels sont les thÚmes principaux des Sonnets de Louise Labé ?
Les thĂšmes principaux des sonnets de Louise LabĂ© s’articulent autour de l’amour, la passion, la fĂ©minitĂ© et le dĂ©sir. La poĂ©tesse exprime des sentiments profonds et intenses Ă travers ses vers, dĂ©fiant les conventions de l’Ă©poque. Ses sonnets mettent en lumiĂšre la complexitĂ© des Ă©motions et des dĂ©sirs fĂ©minins, un thĂšme relativement rare dans la littĂ©rature de la Renaissance.
Comment le sonnet Permet-il d’exprimer ses sentiments ?
Le sonnet est une forme poĂ©tique qui permet d’exprimer des sentiments de maniĂšre dense et concentrĂ©e. Sa structure fixe, avec ses quatorze vers et son schĂ©ma de rimes spĂ©cifique, crĂ©e un cadre dans lequel le poĂšte peut explorer un sentiment ou une idĂ©e en profondeur. Le volta, ou tournant, qui se produit gĂ©nĂ©ralement vers la fin du sonnet, donne l’occasion au poĂšte d’introduire une rĂ©vĂ©lation, un changement de perspective ou une rĂ©solution, enrichissant ainsi l’expression des sentiments.
Quel est la particularité du sentiment amoureux décrit dans les sonnets de Louise Labé ?
Louise LabĂ©, dans ses sonnets, offre une reprĂ©sentation unique du sentiment amoureux. Elle exprime une passion fĂ©minine intense et non dissimulĂ©e, ce qui Ă©tait inhabituel pour son Ă©poque. Ses sonnets prĂ©sentent l’amour comme une force Ă la fois exaltante et dĂ©vastatrice, capable de provoquer une joie immense mais aussi une souffrance profonde. La franchise et l’honnĂȘtetĂ© avec lesquelles elle aborde ces sentiments contrastent fortement avec les reprĂ©sentations plus retenues et idĂ©alisĂ©es de l’amour dans beaucoup d’autres Ćuvres de la Renaissance.