Syllo-quoi ? Si le mot de syllogisme te rend perplexe, ou que tu l’as déjà vaguement entendu sans en comprendre le sens, tu es au bon endroit. C’est parti pour découvrir ce type de raisonnement qui date de la Grèce Antique ! 🤩
Définition et origines du syllogisme 📖
Le syllogisme est une forme de raisonnement logique en trois temps dont découle une conclusion inévitable : 2 propositions appelées prémisses, permettent d’aboutir à la conclusion. Le sens du mot est contenu dans son étymologie, syn (avec) et logos (discours, parole, idée). Pour le dire clairement, il s’agit d’une idée (associée) avec (une autre). 🤲
Tu as sûrement déjà vu la réflexion suivante :
Tous les hommes sont mortels. Socrate est un homme. Donc Socrate est mortel.
Et bien cette structure, c’est un syllogisme ! 😄
Mais alors, ça vient d’où le syllogisme ? 🧐
Le syllogisme ne date pas d’hier : c’est le philosophe grec Aristote qui a formalisé cette notion dans Premiers Analytiques au IIIe siècle avant J.-C. Il en donne une définition :
Le sullogismos est un discours dans lequel, certaines choses étant posées, une chose distincte de celles qui ont été posées s’ensuit nécessairement, du fait que celles-là sont
Aristote
On retrouve dans cette citation l’idée de prémisses (les « choses posées », les faits établis), qui permettent nécessairement de déduire une troisième idée : la conclusion. 💡
Pourtant, l’idée lui est antérieure. Les sophistes et les disciples de Platon voulaient, dès le IVe siècle avant J.-C., codifier les règles du débat rhétorique. L’idée était de forcer son adversaire à admettre un argument qui découle logiquement de propositions qu’il aurait déjà admises par ailleurs.
Par exemple, si tu veux convaincre ton adversaire que Socrate est mortel, tu peux passer par des voies détournées et lui faire d’abord admettre que les hommes sont mortels, et que Socrate est un homme.
C’est une façon de tromper ton adversaire pour qu’il ne se rende pas tout de suite compte où tu veux l’amener. C’est un peu le twist auquel il ne s’attend pas !
Qui sont les sophistes ? 🔎
Les sophistes, les « spécialistes du savoir » sont fortement critiqués par Platon, l’auteur de la célèbre allégorie de la caverne. Dans Gorgias, il met en scène son mentor Socrate qui s’oppose à plusieurs sophistes pour démonter leurs arguments. Selon Platon, les sophistes privilégient l’efficacité du discours et la volonté de convaincre, à la vérité.
Aristote, lui, est plutôt favorable aux techniques oratoires pour convaincre. Cependant, il considère que le rhéteur ne doit pas manipuler son auditoire par ses émotions :
« Ce serait comme de tordre la règle dont on s’apprête à se servir ».
À lire aussi
C’est bien Aristote qui a, par la suite, expliqué l’utilité du syllogisme dans une démonstration scientifique. Puisque c’est un raisonnement presque mathématique, basé sur des faits et qui permet donc d’aboutir à une conclusion solide, le syllogisme permet de soutenir un raisonnement scientifique. 🔬
La rhétorique 👀
La rhétorique était fondamentale dans la Grèce Antique. Il s’agit d’une pratique socialement codifiée visant à convaincre autrui. Ce sont toutes les techniques qui permettent de donner de la force à un discours et le rendre plus percutant. C’est Aristote qui a fixé les règles de cet art oratoire.
Les rhéteurs étaient donc ces orateurs très éloquents, qui pouvaient enseigner les principes de la rhétorique. Aujourd’hui, la rhétorique a parfois un sens péjoratif, avec l’idée qu’elle sert à manipuler l’auditoire.
Ton premier cours particulier est offert ! 🎁
Nos profs sont passés par les meilleures écoles et universités.
La formation du syllogisme ➕
Ainsi, comme tu as pu le comprendre, le syllogisme est formé selon une logique presque mathématique : un syllogisme simple se construit donc toujours de la même façon. 🤓
Si B est A et que C est B et, alors C est A.
Pour t’expliquer la formation du syllogisme, tu peux t’appuyer sur cette réflexion logique :
👉 Tous les félins (B) sont des mammifères (A). Or, les chats (C) sont des félins (B). Donc tous les chats (C) sont des mammifères (A). 🐈
Prémisse majeure, mineure et conclusion
Tu as pu comprendre que le syllogisme est découpé en plusieurs parties : les prémisses et la conclusion.
✅ Les prémisses (ou propositions) sont appelées prémisse majeure et prémisse mineure en fonction de leur rôle dans la phrase.
➡️ La prémisse majeure : il s’agit de la prémisse principale, l’affirmation la plus générale parmi les deux, et souvent située en premier dans la démonstration.
Dans l’exemple précédent, ça serait :
👉 Tous les félins sont des mammifères.
➡️ La prémisse mineure : elle est plus spécifique et entre dans le cadre posé par la prémisse majeure.
👉 Les chats sont des félins.
Ici tu peux constater que la phrase porte sur des catégories plus resserrées, et liées à la prémisse majeure.
L’ordre entre les prémisses n’est pas fondamental et peut être inversé sans changer la valeur des prémisses :
👉 Les chats sont des félins. Or, tous les félins sont des mammifères. Donc tous les chats sont des mammifères.
➡️ La conclusion : comme son nom l’indique, c’est la composante du syllogisme qui vient en dernier, pour conclure la réflexion. C’est un fait qui est tiré logiquement des prémisses, et qui est normalement irréfutable si les affirmations précédentes sont correctes.
Ici, c’est :
👉 Donc tous les chats sont des mammifères.
Grand, moyen et petit terme
Tu peux reprendre l’exemple précédent.
👉 Tous les félins (B) sont des mammifères (A). Or, les chats (C) sont des félins (B). Donc tous les chats (C) sont des mammifères (A).
✅ Les différents termes A, B, C contenus dans le syllogisme ont chacun un rôle déterminé dans la réflexion. Ils ne sont pas placés au hasard !
Pour qu’un syllogisme soit valable, chacune des deux prémisses doit contenir un terme de la conclusion :
➡️ Le terme que l’on retrouve à la fois dans la majeure et dans la conclusion est appelé grand terme (ou terme majeur) : c’est le terme A, le plus général, ici « mammifère ».
➡️ Le terme que l’on retrouve à la fois dans la mineure et dans la conclusion est appelé petit terme (ou terme mineur) : c’est le terme C, le plus particulier, ici « chat ».
➡️ Le terme restant est celui qui apparaît dans les deux prémisses, appelé terme moyen. C’est celui qui permet de connecter la mineure et la majeure pour amener à la conclusion : c’est le terme B, ici « félin ».
Les différentes catégories de syllogismes
Les modes du syllogisme
✅ Aristote a catégorisé les syllogismes selon 3 critères :
- la place du terme moyen : s’il est sujet ou prédicat (tout ce qui n’est pas sujet) dans la proposition
- la quantité des propositions : universelle (tous…) ou particulière (certains…)
- la qualité des propositions : affirmative (sont) ou négative (ne sont pas)
Tu as peut-être déjà vu les modèles introduits par les lettres AEIO. Ce sont des abréviations pour désigner chaque forme de prémisse possibles :
A = une proposition universelle affirmative : Tous les chats sont des félins. 😺
E = une proposition universelle négative : Aucune tortue n’est un félin. 🐢
I = une proposition particulière affirmative : Certains chats sont gris.🐈⬛
O = une proposition particulière négative : Certains chats ne sont pas gris.🐈
➡️ Ainsi chaque mode du syllogisme sera identifié une combinaison de 3 lettres, chacune désignant la prémisse majeure, mineure et la conclusion :
Tous les félins sont des mammifères (🅰️). Or, tous les chats sont des félins (🅰️). Donc tous les chats sont des mammifères (🅰️). = 🅰️🅰️🅰️
Le savais-tu ? 👀
En fonction de la place du moyen terme, des combinaisons de propositions et de la forme de la conclusion, il y a 512 modes de syllogismes possibles ! Heureusement, seuls 24 ont été déterminés comme valides.
Besoin d’un prof particulier ? ✨
Nos profs sont là pour t’aider à progresser !
Quelques types de syllogisme
❗Les syllogismes catégoriques
Ils ne contiennent ni condition ni alternative. Ils permettent d’arriver à une conclusion simple et directe, sans détour :
👉 Tous les félins sont des mammifères. Or tous les chats sont des félins. Donc tous les chats sont des mammifères.
❓ Les syllogismes hypothétiques
La conclusion auxquels ils aboutissent est issue d’une ou deux hypothèses.
👉 Si tu ne mets pas ton réveil, tu vas rester endormi. Si tu restes endormi, tu vas rater ton examen. Donc si tu ne mets pas ton réveil, tu vas rater ton examen.
⚠️ Ces syllogismes sont risqués, car ils partent du principe que l’hypothèse formulée est correcte. Or il est possible qu’une hypothèse s’avère fausse et donc que la conclusion ne soit pas valable
Par exemple, tu pourrais être réveillé par autre chose que ton réveil (ton chien, tes parents…).
⭕ Les syllogismes disjonctifs
Une de ses prémisses contient une disjonction, c’est-à-dire une situation qui présente 2 états, où si l’un est faux alors l’autre est vrai. En général, on le repère avec la structure « soit… soit », ou « ou bien… ».
👉 Soit l’enfant finit son assiette, soit il est puni. Il n’a pas fini son assiette. Donc il est puni.
⚠️ Un des risques de cette forme de syllogisme est qu’elle cache une autre possibilité qui n’est pas formulée. La conclusion tirée ne serait alors pas valable.
👉 Soit tu as froid, soit tu as chaud. Tu n’as pas chaud. Donc tu as froid.
Ici, le syllogisme part du principe qu’il n’existe que deux états (froid et chaud) alors qu’il existe un entre-deux.
Utilisation et limites du syllogisme dans le débat
⚠️ Attention, on ne construit pas un syllogisme n’importe comment. Pour qu’il soit valable, il y a plusieurs règles à respecter.
✅ Des règles de forme :
➡️ Si une des deux propositions est négative, la deuxième sera obligatoirement positive. Il est impossible de tirer une conclusion de deux prémisses négatives.
👉 Les oiseaux ne sont pas des mammifères. Or les tortues ne sont pas des oiseaux. Donc les tortues sont des mammifères.
Ici, il y a une conclusion qui, par hasard, pourrait être vraie (par exemple en remplaçant tortue par chat), mais qui n’est pas une conclusion inévitable. En disant ce qu’une chose n’est pas, tu ne dis pas ce qu’elle est.
➡️ Si les deux prémisses sont positives, alors la conclusion le sera aussi.
➡️ Il ne peut y avoir deux prémisses qui portent sur des termes particuliers : il faut obligatoirement qu’une des deux propositions soit générale, sans quoi il n’y aura pas de lien entre elles.
👉 Les chats sont des mammifères. Les tortues sont des reptiles.
Ici il n’y a pas aucune conclusion logique que tu pourrais tirer de ces prémisses.
➡️ Il n’est pas possible de tirer une conclusion générale à partir d’un élément particulier :
👉 Tous les tigres sont des félins. Un chat est un félin. Donc tous les chats sont des tigres.
On appelle cela un paralogisme. Ici félin est un attribut du chat, mais il ne lui est pas exclusif ! De nombreux animaux peuvent être des félins sans être des chats.
✅ Des règles de fond :
➡️ Comme tu as pu le comprendre, toutes les prémisses doivent être véridiques. En effet, je peux tirer une conclusion logique et inévitable de propositions qui sont fausses.
Ex : Tous les oiseaux sont des mammifères. Or les pigeons sont des oiseaux. Donc les pigeons sont des mammifères.
Évidemment les oiseaux ne sont pas des mammifères, donc la conclusion sera fausse alors que le raisonnement est logique. On dit alors que le syllogisme est valide, mais qu’il n’est pas concluant.
➡️ Dans la même logique, il faut faire attention aux sophismes (ou faux dilemmes). Comme évoqué dans le cas du syllogisme disjonctif, il s’agit d’une situation ou l’on réduit les possibilités à deux choix mutuellement exclusifs. Souvent, c’est parce que tu veux forcer ton adversaire à prendre position sur l’une ou l’autre possibilité, sans considérer l’existence d’une troisième voie.
Un exemple un peu extrême :
👉 Soit tu es pour la liberté d’expression, soit tu es pour la dictature. Tu veux encadrer la liberté d’expression ? Alors tu es pour la dictature.
Ce dilemme n’est pas valable puisque l’on peut par exemple mettre en place des règles (comme interdire les incitations à la haine) sans avoir une dictature. Mais cela force l’adversaire à se justifier, surtout sur un sujet sensible, et à perdre du temps de parole par exemple.
Tous ces syllogismes non concluants peuvent être utilisés volontairement par l’orateur pour faire passer ses arguments comme logiques même s’ils sont infondés.
Avant de partir, voici quelques questions pour voir si tu as bien tout retenu !
À lire aussi
Et voilà, maintenant tu es prêt à créer tes meilleures argumentations à l’aide du syllogisme ! 😎