Histoire et mémoires, deux notions à la fois opposées et complémentaires ! Car si mémoires et Histoire nous mettent en récit le passé, elles peuvent parfois entrer en conflit. Aujourd’hui on te fait une fiche de révision sur ce thème abordé en cours d’HGGSP. 🚀
Des termes à la fois distincts et complémentaires
L’Histoire, une science 🔬
Jetons d’abord un œil au terme « histoire ». 👀
L’histoire peut se définir comme une reconstruction scientifique du passé qui se veut objective. Le travail de l’historien est donc de construire un récit le plus proche possible de la vérité.
Elle s’appuie sur la confrontation de sources diverses.
👉 Archéologie ;
👉 témoignages ;
👉 textes littéraires ;
👉 textes juridiques ;
👉 discours, articles, affiches ;
👉 documents iconographiques ;
👉 déclarations et manifestes ;
👉 analyses d’historiens.
L’iconographie, kézako ? 🧠
Il s’agit de l’étude des représentations figurées d’un sujet. Elles peuvent prendre la forme de sculpture, de peintures, de gravures…
La mémoire comme témoignage individuel
Passons maintenant au second terme de notre fiche de révision, à savoir : la mémoire ! ✍️
La mémoire renvoie aux souvenirs d’un individu ou d’une collectivité. Parler de mémoire, c’est donc d’un point de vue, d’un témoignage personnel. Elle se réfère aussi aux différentes pratiques commémoratives qui en découlent, selon des enjeux divers, souvent revendicatifs ! Par la mémoire, on peut vouloir ne pas oublier des faits du passé mais aussi chercher une compensation morale, symbolique ou financière. 💭
La mémoire a donc une vision subjective, ce qui la distingue de l’Histoire. Elle reste un élément très utile à l’historien en tant que source !
L’Histoire est la mémoire du monde
Henri Lacordaire
ancien avocat devenu prêtre
Selon l’historien Antoine Prost, la mémoire est un événement affectif qui isole un élément de son contexte. Elle est donc une ressource que l’historien doit manipuler avec précaution. Par ses recherches et son enseignement, il peut agir sur la mémoire.
👉Un exemple concret : en 1973, le travail de l’historien Robert Paxton sur la collaboration du régime de Vichy dans la Seconde Guerre mondiale met fin au mythe d’une France presque unanimement résistante !
En somme, histoire et mémoire sont liés, la mémoire est une source de témoignage pour l’historien, et l’histoire enrichit et corrige cette mémoire.
Histoire et mémoire des conflits
Les conflits et leur histoire sont gravés dans les mémoires individuelles et la mémoire collective des sociétés. La Première Guerre mondiale et la guerre d’Algérie ont fait l’objet de nombreux travaux historiques qui peuvent être utilisés à des fins politiques. En voici un aperçu !
Un débat historique : la Première Guerre mondiale 🪖
La guerre moderne, qui touche les populations civiles et utilise des outils industriels, marque le XXème siècle : il s’agit de la Première Guerre mondiale (1914-1918). Elle fait l’objet de l’un des débats historiques les plus importants, à savoir : qui a déclenché cette guerre ?
Dès le début de la guerre, l’Allemagne, qui est à l’origine de la déclaration de guerre contre la France, envisage dès l’été 1914 de publier des dépêches diplomatiques et documents officiels dans le but de souligner la responsabilité de l’adversaire.
Cette question de responsabilité a une importance politique majeure.
👉 Pour la France, cela justifie le paiement de lourdes réparations par l’Allemagne et une politique de fermeté à son égard.
👉 Pour l’Allemagne, tout le pays n’est pas responsable, seulement les socialistes et dirigeants politiques de la république de Weimar.
La république de Weimar, kézako ?
C’est le nom donné au régime de l’Allemagne qui a été mis en place après la Première Guerre mondiale, de 1919 à 1933.
Le débat mobilise également les historiens durant l’entre-deux-guerres. C’est après 30 ans de controverse que la responsabilité allemande s’impose, sans pour autant négliger celle des autres puissances, notamment l’Autriche-Hongrie, la Russie et la France.
Le savais-tu ?
L’historien Fritz Fischer a publié en 1961 un livre intitulé Les Buts de guerre de l’Allemagne impériale 1914-1918. Selon lui, l’Allemagne aurait déclenché les hostilités afin d’accéder au rang de puissance mondiale. Sa thèse s’opposait aux analyses dominantes de l’époque et a beaucoup fait débat.
Le climat s’est depuis apaisé, pour plusieurs raisons.
- La construction européenne à partir de 1951 se fonde sur la réconciliation franco-allemande et permet d’instaurer une solidarité entre les Etats d’Europe de l’Ouest ;
- les recherches historiques se réorientent au profit de la Seconde Guerre mondiale ;
- à partir des années 1980/1990, les historiens privilégient une approche anthropologique, culturelle et sociale de la Première Guerre mondiale. Ils ne s’intéressent plus à la question des responsabilités. Ils vont plutôt s’orienter les questions de violence de guerre, de « brutalisation » des sociétés.
La guerre d’Algérie de 1954 à 1962 🇩🇿
La guerre d’Algérie, qui a longtemps été une guerre sans nom, est l’une des crises majeures de l’histoire de France au XXe siècle. L’Etat français a en fait refusé de reconnaître qu’il s’agissait d’une guerre. Pour désigner la situation, on parlait alors « d’événements » ou de « pacification ». La mémoire de cette guerre est refoulée, d’autant plus dans le contexte de l’expansion économique des Trente Glorieuses.
🧐 On te remet dans le contexte : de 1954 à 1962, la France mène une guerre de reconquête pour conserver l’Algérie, qui est sa principale colonie de peuplement. Il y a plus d’un million d’européens qui vivent sur cette terre, on les surnomme les pieds noirs.
Un mouvement indépendantiste algérien s’y développe, le Front de Libération Nationale (FLN), dans la volonté de chasser le colonisateur et de créer un Etat algérien.
Au départ, il n’y a pas eu de déclaration de guerre, les lois de la guerre n’ont donc pas été appliquées. Massacres, tortures, ont coûté la vie à de nombreuses personnes, surtout algériennes.
L’État a pratiqué une série de lois d’amnistie entre 1962 et 1982 pour une grande partie des protagonistes de cette guerre.
L’amnistie, kézako ?
Il s’agit d’un acte du pouvoir législatif par lequel sont suspendues des sanctions.
Mais du côté de l’Algérie alors ? Là-bas, la guerre est mythifiée, c’est-à-dire qu’elle fait partie de la mythologie nationale. Le rôle des Algériens y est magnifié. L’histoire est instrumentalisée, ce qui aura trois conséquences :
- le rôle du FLN est survalorisé en dépit de celui des autres groupes nationalistes ;
- la guerre est présentée comme un soulèvement populaire unanime ;
- les pertes sont surestimées (1,5 million de pertes contre en réalité : entre 300 000 et 400 000).
Si tu veux connaître plus en détails l’histoire de la guerre d’Algérie, c’est dans cet article !
👉 Dans les années 1990, on voit émerger une politique de reconnaissance mémorielle de la part de la France. La période coloniale et la guerre d’Algérie sont des sujets au cœur des relations entre les deux pays. L’histoire commune reste encore aujourd’hui un enjeu diplomatique.
Le savais-tu ? 🧠
En 2021, l’historien Benjamin Stora remet au président de la République un rapport sur les mémoires de la guerre d’Algérie. Il parle d’une « guerre des mémoires » et souligne que le temps est venu de « chercher à expliquer ensemble l’événement colonial ».
Histoire, mémoire et justice ⚖️
Les guerres et génocides qui ont profondément marqué le XXe siècle mènent à une nouvelle réflexion juridique. Après la Seconde Guerre mondiale, qui a eu lieu de 1939 à 1945, le tribunal militaire de Nuremberg est mis en place jusqu’en 1946, pour juger les crimes d’un certain nombre de responsables nazis. De nouvelles catégories de crimes sont alors inventées afin de pouvoir punir les atrocités commises pendant la guerre. On va notamment voir apparaître les termes suivants.
👉 Crime contre l’humanité : lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque (selon Amnesty France).
👉 Génocide : c’est la destruction méthodique d’un groupe humain (selon Le Robert). Il peut être motivé par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux.
Ces deux notions sont aujourd’hui intégrées dans les statuts de la Cour pénale internationale.
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La justice à l’échelle locale : les tribunaux gacaca face au génocide des Tutsis
En 1994, en à peine trois mois, près d’un million de Tutsis du Rwanda ont été assassinés. Le massacre est perpétré par les Hutu, une autre ethnie du pays.
✈️ C’est en fait la mort dans un accident d’avion du président rwandais qui permet aux Hutus radicaux de s’emparer du pouvoir. En quelques semaines, ils parviennent à massacrer la plus grande partie de la population tutsie, et des Hutus modérés, profitant de l’inaction internationale.
Le savais-tu ? 💡
On parle ici de génocide de proximité. En effet, les tueurs des Tutsis sont leurs voisins.
Après le génocide, une question se pose : comment juger les meurtriers et réconcilier une population profondément meurtirie et divisée ? Trois grands types de jugement ont alors lieu.
- Le tribunal pénal international pour le Rwanda, situé à Arusha en Tanzanie. Sans prendre en compte les spécificités du génocide rwandais, ont été mis en accusation les grands décideurs, commanditaires du massacre dans les populations Hutus. Seulement 35 personnes ont été condamnées.
- Des justices nationales dont le Rwanda et d’autres Etats. Des juridictions nationales se sont tenues dans le monde entier, à la fois au Rwanda, dans les pays limitrophes, mais aussi à Bruxelles, Montréal ou encore Paris.
- Et enfin : une justice locale avec les tribunaux gacaca. Ces tribunaux populaires se sont tenus au Rwanda, entre voisins, dans les campagnes, les villages, parfois même dans les prisons. Il s’agit d’une forme totalement inédite de justice. Cette justice locale a été essentielle à la réconciliation entre les Tutsis et les Hutus ! Elle a permis de juger le génocide par ceux qui l’ont vécu.
La justice à l’échelle internationale : le tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie
La Yougoslavie est un État multinational créé en 1918 et qui a cessé d’exister en 2003. Il regroupait alors 6 républiques :
👉 la Serbie ;
👉 la Croatie ;
👉 la Slovénie ;
👉 la Bosnie-Herzégovine ;
👉 le Monténégro ;
👉 la Macédoine.
Plusieurs ethnies vivent ensemble et le nationalisme se développe. Les Etats réclament leur indépendance, ce qui conduira à une guerre civile très violente, opposant la Serbie à la Bosnie et la Croatie. En avril 1992, la ville de Sarajevo en Bosnie est encerclée par les forces serbes. Pendant trois ans, la population civile connaît des conditions de vie terribles (pénuries d’eau, de vivres, de médicaments, arrestations, internements, meurtres).
Cette guerre révèle l’impuissance de l’UE et de l’ONU à rétablir la paix. La guerre prend fin en 1995 avec l’action de l’OTAN et des Etats-Unis.
L’action de la justice internationale
Afin de juger les criminels responsables, le Tribunal pénal international de l’ex-Yougoslavie (TPIY) est mis en place dès 1993. Ce tribunal a alors pour but de juger les coupables selon plusieurs types de crimes :
- de guerre ;
- contre l’humanité ;
- de génocide.
Il a fermé ses portes le 31 décembre 2017. Bien qu’il n’existe désormais plus, le tribunal a ouvert la voie à une justice internationale permanente !
👉 Comme on vient de le voir, la justice peut se faire à plusieurs échelles, du local à l’international.
Histoire et mémoire du génocide des Juifs et des Tsiganes
👀 Regardons de plus près le génocide des Juifs et des Tsiganes, qui s’est produit par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale.
À la fin de cette guerre, de novembre 1945 à octobre 1946, a lieu le procès de Nuremberg. Ce tribunal militaire international est fondé sur des témoignages et des preuves matérielles incontestables du génocide et de la destruction des populations civiles européennes.
↪️ L’idée est de mettre en place une justice internationale. Certaines notions juridiques sont alors à inventer, dont le terme de génocide. Il n’apparaît pas encore dans les statuts du tribunal. Il n’est évoqué que lors du procès des Einsatzgruppen, ces groupes d’intervention mobiles qui étaient chargés d’exterminer les opposants et les Juifs.
Mais comment sont jugés les crimes après Nuremberg ? 🤔
De très nombreux procès sont organisés dans chaque zone d’occupation. Ont lieu également les 12 « procès successeurs » qui ont pour ambition de juger ceux qui auraient pu paraître comme des exécutants secondaires des crimes contre l’humanité.
🌎 Dans le reste du monde, d’autres procès ont été mis en place pour mieux comprendre le génocide. Eichmann, haut responsable nazi, est enlevé puis conduit à Jérusalem où il est condamné à mort à l’issue de son procès, en 1961. En France également, plusieurs responsables nazis sont inculpés, comme René Bousquet ou encore Paul Touvier.
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Le génocide dans la littérature 📖 et le cinéma 🎥
Le génocide a profondément marqué la littérature et le cinéma, qui ont à leur manière permis de nommer l’indicible.
Dans la littérature 📚
Les récits dans la littérature ont plusieurs effets.
- Ils permettent d’établir la vérité, alors que tout était fait par les nazis pour effacer les témoignages ;
- ils sont un témoignage des disparus (via les les lettres, les journaux intimes…) ;
- ils sont un témoignage des survivants.
On peut citer notamment :
👉 Le Journal d’Anne Frank, une jeune fille juive allemande qui est morte au camp de Bergen-Belsen en 1945 ;
👉 Si c’est un homme de Primo Levi, témoignage de sa survie dans le camp d’extermination nazi d’Auschwitz.
Au cinéma, du documentaire à la fiction 🎬
Du côté du cinéma, on voit d’abord l’apparition de documentaires, à partir d’images filmées lors de la libération des camps.
On peut citer ici :
👉 Nuit et Brouillard d’Alain Resnais ;
👉 Shoah de Claude Lanzmann.
Le cinéma est aussi utilisé pour évoquer et recréer, de par ses fictions.
👉 Le vieil homme et l’enfant de Claude Berri ;
👉 Holocauste, film de près de 9 heures qui retrace la vie d’une famille juive allemande exterminée dans les camps.
Ces témoignages et mises en scène du génocide sont un précieux témoignage et permettent de lutter contre l’oubli.
Tu l’auras compris, histoire et mémoire sont des notions à la fois distinctes et complémentaires. La mémoire permet d’offrir un témoignage de l’Histoire, et tient une place particulière chez l’historien qui se tient d’adopter une démarche scientifique.
Et voilà, maintenant qu’on a fait le tour du thème Histoire et mémoire ensemble, on espère que tu es un as sur tous les sujets abordés ! N’hésite pas à faire un tour sur le blog si tu souhaites approfondir tes connaissances. 😉