Dans notre premier article sur l’affirmation de la puissance chinoise, nous évoquions la stratégie militaire du collier de perles de la Chine. Mais cette stratégie s’inscrit dans un plan plus large, dans le projet du siècle pour la République Populaire de Chine (RPC) : celui des “nouvelles routes de la soie”.
🌏 La route de la soie est un réseau de routes commerciales entre l’Asie et l’Europe, ouvert au IIe siècle avant J.C. Elle est ensuite au cœur des échanges Est-Ouest pendant des siècles : de nombreuses marchandises transitent à travers cette route terrestre, qui tire son nom du principal produit échangé, la soie. Elle est néanmoins abandonnée à partir du XVe siècle au profit d’une route maritime, la route des Indes.
🔁 Les “nouvelles routes de la soie”, elles, sont encore plus ambitieuses : lorsqu’il annonce le projet en 2013, Xi Jinping envisage de relier la Chine à l’Asie Centrale et à l’Europe… Mais aussi à l’Afrique et au Moyen-Orient, grâce à de nombreux axes terrestres et maritimes.
Cette stratégie peut-elle permettre à la Chine de construire “sa” mondialisation et de supplanter les USA comme nouveau leader mondial ? 🤔
2️⃣ Deuxième épisode de notre série. ✌️
Les enjeux des “nouvelles routes de la soie” : la mondialisation à la chinoise 🇨🇳
Le contexte historique et géopolitique 👀
C’est en 2013 que Xi Jinping annonce son grand dessein des “nouvelles routes de la soie”, alors appelé “One Belt, One Road” (OBOR). 📣
L’OBOR s’inscrit donc dans l’idée de la “régénération impériale” (“Minzu Fuxing”) affirmée par Sun Yat-Sen au début du XXe siècle, et reprise par l’ensemble des dirigeants de la RPC, et en particulier par son leader actuel, qui affirme :
Parvenir au grand renouveau de la nation chinoise constitue le plus grand rêve des temps modernes pour le pays.
👉 La réminiscence de la puissance impériale est un rêve pour Xi Jinping et la RPC en 2013. Les “nouvelles routes de la soie” sont censées faire de ce rêve une réalité.
2017 est une année charnière pour l’OBOR, qui est renommé “Belt and Road Initiative” : non seulement de nombreuses lignes sont inaugurées, mais le premier sommet de la BRI a également lieu cette année.
Néanmoins, l’événement le plus important pour l’OBOR en 2017, c’est sûrement l’entrée en fonction de Donald Trump à la Maison Blanche 🇺🇸 . La présidence de Trump est en effet celle du repli américain, de l’abandon de son leadership et du multi-latéralisme.
Ce retrait joue alors en faveur de la RPC : elle peut en profiter pour s’affirmer comme le chantre du libéralisme, comme le défenseur de la mondialisation, et comme un leader mondial de substitution. 👑
Répondre aux besoins en infrastructures de l’Eurasie 🔨
Les “nouvelles routes de la soie” sont principalement centrées sur le transport routier, ferroviaire, maritime ou aérien. Or, les besoins en infrastructures sont particulièrement importants en Eurasie et en Afrique.
Par exemple, une étude de l’ADB (Asian Development Bank) en 2017 a montré que les besoins de l’Eurasie en la matière étaient de l’ordre de 26000 Md $ pour la période 2016-2030, soit un besoin annuel de 1600 Md $ d’investissement.
L’OBOR est donc censé répondre à de tels besoins, notamment dans les PED (Pays en Développement). La coopération avec ces pays est un objectif historique de la RPC : à partir des années 1950, la Chine de Mao invitait les PED à suivre la “troisième voie” qu’elle pouvait dessiner dans la Guerre froide. Aujourd’hui, elle a enfin les moyens de ses ambitions historiques d’influence. 💸
Diversifier ses partenaires et réduire sa dépendance : le “dilemme de Malacca” 🔀
Puisque l’OBOR dessine une série de corridors terrestres et de voies maritimes, une série de “routes” accompagnées de “ceintures”, il permet à la Chine de multiplier les partenariats.
💰 Il permet d’abord à la RPC d’accroître ses exportations de biens de consommation et de biens intermédiaires en diversifiant ses pôles d’exportation. Il favorise en effet les échanges avec toute l’Europe, y compris à l’Est, avec l’Asie, l’Afrique et le Moyen Orient, et permet donc de réduire sa dépendance à l’égard des importations de l’Europe de l’Ouest et des USA.
🔋 Ensuite, la Chine entend sécuriser ses approvisionnements en énergie, y compris en diversifiant ses pôles d’importation énergétique afin de réduire sa dépendance à l’égard du Moyen-Orient. Nous avons déjà évoqué, dans le cadre de notre précédent article sur le “collier de perles”, le “dilemme de Malacca”, expression née à la suite d’un discours de Hu Jintao en 2003.
Ce dilemme renvoie à la dépendance de la RPC, notamment pour ses importations énergétiques, à l’égard de ce détroit, et peut même renvoyer à une dépendance commerciale à l’égard des routes maritimes en général, principalement contrôlées par la puissante marine américaine.
👉 Dans la continuité de la stratégie du “collier de perles”, l’OBOR vise à accroître le contrôle de la RPC sur la route maritime passant par ce détroit, mais aussi à diversifier les partenaires et les routes commerciales pour éviter Malacca. D’où l’importance des nombreux corridors économiques terrestres.
Dominer le monde et la mondialisation à l’horizon 2049 🌏
La “Belt and Road Initiative” doit permettre de promouvoir une “mondialisation à la chinoise”, conforme aux intérêts de la RPC. La multiplication des chantiers d’infrastructure doit en effet accroître la présence de la Chine dans les différentes régions du globe, et accroître la dépendance des différents pays à l’égard de sa technologie et de ses capitaux.
L’objectif ultime devra être atteint d’ici 2049 : le projet de ceinture économique terrestre jusqu’à l’Ouest européen et de route maritime jusqu’à l’Afrique, la Méditerranée et même l’Amérique du Sud sera parfaitement accompli avant le centenaire de la RPC.
100 ans après la fondation de la RPC, 100 ans après le début du “siècle américain” (Henry Luce), le “siècle chinois” aura définitivement commencé. C’est en tout cas l’ambition de l’actuel président de la RPC. 💪
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Les prémices des “nouvelles routes de la soie” 🔙
La stratégie du “collier de perles” 📿
On l’a déjà évoqué : la stratégie militaire du “collier de perles” initiée à la fin des années 1990 vise à accroître la présence de la marine de la RPC dans l’Océan Indien, en mer de Chine méridionale et orientale, et à augmenter le contrôle de la Chine sur les routes maritimes face à l’hégémonie maritime américaine.
Pour ce faire, la RPC favorise les investissements dans des ports dans des pays partenaires comme le Pakistan, le Bangladesh, le Myanmar ou le Sri Lanka. Bien que le “collier de perles” ait une dimension militaire que l’on ne retrouve pas ailleurs, on est bien dans la logique de l’OBOR. Cette stratégie préfigure ainsi ce qu’est la “nouvelle route de la soie maritime” dans le plan du président de la RPC. ⚓
La coopération avec la Russie en Sibérie 🤝
La Chine n’a pas attendu 2013 et le lancement de l’OBOR pour chercher à diversifier ses sources d’approvisionnement énergétique. Dès 2010, elle s’est logiquement tournée vers le voisin russe, et vers ses ressources de Sibérie orientale. 🛢️
Une première connexion pétrolière sino-russe de plus de 1000 km entre Skovorodino et Daqing a ainsi été inaugurée cette année-là, et a permis d’accroître les échanges de pétrole entre les deux pays par la suite. Une telle coopération est une première étape de l’intégration de la Fédération russe et de la Sibérie dans l’OBOR.
La stratégie régionale du Grand Mékong 🔎
L’OBOR est une stratégie mondiale ou quasi-mondiale. En réalité, il ne fait que transposer à l’échelle mondiale une stratégie d’intégration menée jusqu’alors à l’échelle régionale : le projet du “Grand Mékong”, initié en 2004, sous la présidence d’Hu Jintao, porte déjà sur la construction d’infrastructures en Asie du Sud-Est. 🌏
L’intégration régionale se base alors sur le développement de zones franches dans les pays partenaires, et ensuite sur le libre-échange : un accord de libre-échange entre la Chine et l’ AFTA (Asian Free Trade Area) est finalisé en 2010.
Surtout, les grands axes se sont multipliés dans la région pour favoriser ces échanges. Les nouveaux oléoducs et axes ferroviaires ont permis de relier les ports de la mer de Chine méridionale à la mer d’Andaman et donc de contourner le « dilemme de Malacca » par un corridor terrestre. De plus, la stratégie du “Grand Mékong” a fait de Kunming en Chine, reliée à Vientiane par une nouvelle liaison TGV, le nouveau hub des relations de la RPC avec l’Asie du Sud-est. 🚄
Des investissements, prêts et contrats massifs : un projet démentiel dans l’intérêt de la RPC ✍️
La puissance financière chinoise 💵
La RPC est à l’origine du projet, et est également à l’origine de la grande majorité des financements : on l’a dit, et on le répète, elle a enfin les moyens financiers de ses ambitions historiques à l’échelle mondiale. La Chine investit, cofinance, ou alors elle prête, ce qui est plus fréquent, mais les financements chinois sont bel et bien présents.
Et on ne parle pas de petits financements. Le projet est démentiel, et témoigne de la puissance financière chinoise : avec un montant total déjà supérieur à 1000 milliards de dollars, il s’agit du plan de développement le plus cher de l’histoire de l’humanité ! 😲
Certaines régions, certains corridors économiques sont particulièrement importants dans l’OBOR, et reçoivent donc des fonds conséquents.
Des exemples de corridors économiques majeurs 👇
L’Asie Centrale et le Kazakhstan au centre de l’OBOR 🇰🇿
L’Asie Centrale avait déjà un rôle majeur dans les anciennes routes de la soie. C’est encore plus le cas dans les nouvelles routes de la soie : alors que l’écrasante majorité des échanges internationaux sont maritimes, les pays enclavés du centre de l’Asie se trouvent ainsi au cœur des échanges dans l’OBOR. Ils bénéficient de précieux financements dans leur quête de développement, et voient leurs échanges augmenter, notamment avec la première économie mondiale en devenir.
La place du Kazakhstan est particulièrement importante. C’est bien à Astana, la capitale kazakh, que le dirigeant de la RPC annonce son grand projet de l’OBOR en 2013. Surtout, le Kazakhstan est à la croisée de deux axes majeurs. 🔀
⬆️ L’axe Nord part du port sec d’Astana vers la Russie. Et c’est par cet axe Nord ou corridor eurasiatique que passe l’immense ligne ferroviaire transcontinentale “Yuxinou”, qui relie Chongqing en Chine à Duisbourg en Allemagne sur 11000km en passant par Moscou.
↙️ L’Axe Sud-Ouest emprunte le port sec de Khorgos au Kazakhstan, en direction du Turkménistan puis de la mer Caspienne. La première liaison de cet axe a été inaugurée entre la RPC et Téhéran en février 2016.
Le corridor économique sino-pakistanais 🇵🇰
Un autre voisin de la RPC qui suscite de nombreux financements et accueille un important corridor économique, c’est le Pakistan. Ports, autoroutes, liaisons ferroviaires, barrages, centrales électriques, mais aussi pipelines : les chantiers sont nombreux au Pakistan, et le budget élevé.
Le principal intérêt de la Chine au Pakistan, nous l’évoquions dans l’article précédent sur le “collier de perles” : il s’agit du port de Gwadar. Une ZES a été inaugurée en 2006 autour de ce port qui donne sur le Golfe d’Oman, face au détroit d’Ormüz où transite 40% du pétrole mondial. D’où l’intérêt de construire des pipelines au Pakistan, pour acheminer du pétrole par voie terrestre, de Gwadar jusqu’au Xinjiang, une nouvelle fois en évitant Malacca. 🛢
En Europe, l’Italie et le corridor balkanique 🇪🇺
Les financements de l’OBOR, on peut également les voir en Europe, la RPC cherchant à y accroître son influence, et à accéder, encore et toujours, à son important marché. Elle y investit partout, et en particulier chez certains partenaires majeurs.
L’Italie est le premier partenaire au sein du G7 à avoir rejoint l’OBOR. Elle a notamment signé un accord en 2019 pour accueillir une zone franche dans le port de Trieste et pour céder une partie de la compagnie aérienne Al Italia. 🤝
La Grèce et les pays de l’Est (y compris des membres de l’UE) sont également visés. La RPC s’appuie notamment sur les sommets “16+1” avec les 16 pays d’Europe Orientale pour former un important “corridor balkanique”, depuis Athènes jusqu’à Budapest, dans une région en besoin de financement.
Des intérêts chinois tangibles 🤑
Les financements résident avant tout dans des aides financières et prêts accordés par les banques, comme la China Development Bank ou l’Eximbank of China, ou par le fonds Silk Road. La nouvelle AIIB (Asian Infrastructure Investment Bank), créée dans le cadre du projet, a également un rôle majeur, et vient concurrencer la Banque Asiatique de Développement (BAD), issue de la Banque mondiale et dominée par le rival américain.
Aux intérêts de ces banques s’ajoutent surtout les intérêts des entreprises chinoises, qui ont obtenu environ 90% des contrats de l’OBOR. La RPC prête à ses pays partenaires pour qu’ils signent des gros contrats avec ces fournisseurs. De tels contrats permettent ainsi d’absorber la surproduction nationale dans l’industrie lourde, et donc de maintenir le rythme de croissance de la RPC. 📈
Les sociétés de la RPC multiplient également les acquisitions infrastructurelles : l’aéroport de Tirana en Albanie, les ports de Port Saïd en Égypte ou de Tanger au Maroc, entre autres. L’exemple le plus marquant est sûrement l’acquisition par COSCO du port d’Athènes, le fameux Pirée, à partir de 2011.
Par ailleurs, le développement des axes de transport depuis la RPC favorise les exportations, et donc le développement des entreprises, en particulier dans la Chine Intérieure. Alors que la stratégie de développement de la RPC s’est jusqu’alors appuyée avant tout sur ses façades maritimes, l’OBOR fait de la Chine Intérieure le point de départ d’échanges terrestres croissants, et permet de réduire les inégalités spatiales du pays.
Une ville comme Chongqing, point de départ du « Yuxinou », est devenue particulièrement dynamique ces dernières années. Elle accueille de plus en plus de sociétés, notamment dans les hautes technologies, qui exportent vers l’Eurasie grâce à la ligne ferroviaire porte-conteneurs. 🚆
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Les limites des nouvelles routes de la soie : un projet qui suscite autant d’inquiétudes que d’enthousiasme 😕
Lors du discours d’Astana de 2013 durant lequel il annonce le lancement de l’OBOR, Xi Jinping assure que “ce projet bénéficiera à tous les pays situés sur ces routes”. Néanmoins, la BRI ne fait pas l’unanimité chez les partenaires de la RPC : elle suscite de nombreuses interrogations et contestations.
Le multilatéralisme à la chinoise ? 🇺🇳
L’OBOR a parfois été comparé au plan Marshall, qui avait vu les USA financer la reconstruction européenne après-guerre, et avait initié leur rôle de leader mondial, du moins au sein du camp occidental.
Néanmoins, alors que la RPC affirme défendre le multilatéralisme, l’OBOR n’a rien de multilatéral ou presque : il s’agit d’une juxtaposition de bilatéralismes ou de multilatéralismes régionaux à portée limitée. Le processus d’intégration mondiale demeure ainsi très morcelé. 🌐
Lors du 1er sommet de l’OBOR en 2017, qui réunit une centaine d’Etats, ce n’est pas un accord global qui est signé. Non, ce sont 270 accords différents qui sont adoptés ! Difficile de faire moins multilatéral.
La contestation des autres puissances régionales : entre partenariat et rivalité 👀
Le sentiment obsidional indien 🇮🇳
Dans la continuité de la stratégie du “collier de perles”, l’OBOR tend à encercler et à isoler le rival indien. Les grands axes développés ont en effet tendance à contourner l’Inde, la RPC nouant des partenariats avec ses voisins. 🔄
Elle mise notamment sur le corridor birman entre les ports de Sittwe et de Kyaukpyu et Kunming en Chine, ainsi que sur le corridor sino-pakistanais. Le second inquiète particulièrement l’Inde, puisqu’il transite par l’Azad-cachemire pakistanais, dont la souveraineté est contestée par l’Inde. Un tel corridor peut même être vu comme une véritable provocation par certains dirigeants indiens.
L’Inde est le deuxième contributeur à l’AIIB, mais est l’une des seules grandes puissances, avec les USA et le Japon, à ne pas vouloir être associées à l’ OBOR. Dès 2016, elle développe une route commerciale concurrente, le “Corridor de croissance Asie-Afrique” ( AAGC), surnommé « la route de la liberté », en coopération avec le Japon, visant à créer un corridor économique indo-pacifique.
👉 De même que la “Look East Policy” entend rivaliser avec le “collier de perles”, la “route de la liberté” entend concurrencer les “nouvelles routes de la soie”.
La rivalité avec la Russie en Asie Centrale 🇷🇺
Le voisin russe, lui, est intégré dans l’OBOR : la coopération énergétique sino-russe et la future création d’une immense ligne ferroviaire “Pékin-Moscou” en témoignent. Surtout, il s’agit d’un maillon central de l’axe Nord depuis le Kazakhstan, du corridor eurasiatique.
Cependant, Moscou voit d’un mauvais œil l’axe Sud-Ouest depuis le Kazakhstan, la route méridionale via l’Asie du Centre, l’Iran et le sud du Caucase. Les russes se méfient donc d’une stratégie d’influence chinoise dans son “étranger proche”, dans sa sphère historique d’influence.
Alors que la Fédération russe a formé l’UEE (Union Économique Eurasiatique) en 2015, une zone de libre-échange visant à asseoir son emprise économique sur l’Asie Centrale, les pays de la région sont de plus en plus proches de la RPC, d’un point de vue diplomatique et économique, notamment du fait de l’OBOR.
👉 L’Asie Centrale, autrefois marginalisée, devient un espace central et disputé, l’enjeu de la rivalité entre Pékin et Moscou, dans leurs projets d’intégration eurasiatique respectifs. La domination du “frère russe” héritée de l’ère soviétique semble sur le point de laisser place à l’emprise du “parrain chinois” sur la région. Et ce n’est pas forcément une bonne nouvelle pour les populations locales.
Les contestations des populations locales ✊
La main-mise croissante de la RPC sur les économies du centre de l’Asie et d’autres partenaires suscite les contestations des populations locales, de nombreux groupes. Certains projets de l’OBOR sont en effet jugés surdimensionnés et éco-destructeurs, et la RPC est parfois accusée d’expansionnisme économique (et même militaire), d’une forme de néocolonialisme.
Par exemple, des plans de barrages hydroélectriques sur le Mékong au Laos ont suscité le mécontentement de nombreux habitants.
La contestation de la présence de la RPC peut même se radicaliser, et devenir extrêmement violente, y compris chez ses partenaires majeurs. C’est notamment le cas au Pakistan, où les séparatistes du Baloutchistan rejettent les “oppresseurs”. Ce groupe a d’ailleurs revendiqué plusieurs attentats anti-RPC, dont l’attentat au consulat de la Chine à Karachi en 2018. 💣
Spectre de l’endettement et suspicions de néocolonialisme 💰
Enfin, la principale limite de l’OBOR est la question de l’endettement des partenaires de la Chine, et en particulier des PED : c’est l’argument principal de ses détracteurs. Les banques chinoises accordent en effet des prêts de plusieurs milliards d’euros, qui font grimper la dette de nombreux Etats, et laissent planer la menace d’une nouvelle crise de la dette.
Au Kenya, par exemple, la nouvelle ligne ferroviaire Mombassa-Nairobi, financée en grande majorité par un emprunt du Kenya auprès de l’Eximbank of China, a doublé le montant de la dette publique kényane depuis 2013.
Surtout, de nombreuses critiques portent sur le “piège de la dette” tendu par la RPC, qui chercherait à s’emparer d’infrastructures stratégiques dans des Etats en défaut de paiement. Le précédent du Sri Lanka a en effet de quoi inquiéter. 😵
Le port d’Hambantota est financé en 2010 par 5 milliards de $ de prêts chinois, qui font exploser la dette srilankaise, jusqu’à ce que l’Etat fasse faillite. La crise se solde en 2017 par une remise de la dette de l’ordre de 1 milliard de $, contre la concession des activités du port à la China Merchant : Hambantota devient alors une concession extraterritoriale de la RPC ! Nous parlions de néocolonialisme plus tôt, nous sommes en plein dedans.
La crise liée à la pandémie a rendu cette question de l’endettement encore plus sensible. De plus en plus d’Etats, faisant face à une baisse de leurs recettes fiscales et à une nécessaire hausse des dépenses publiques, risquent d’être dans l’impossibilité de rembourser les prêts.
Or, les risques du surendettement affectent aussi les intérêts de la RPC. En effet, les défauts de paiement risquent de fragiliser les entreprises chinoises qui remplissent les contrats de l’OBOR avec l’argent de la dette, et la crise de la dette pourrait nuire à l’image de la RPC. 📉
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Conclusion sur les nouvelles routes de la soie 💫
Les “nouvelles routes de la soie”, c’est donc LE grand projet de la RPC, la stratégie censée lui permettre à terme, de dominer le monde. La “Belt and Road Initiative” est censée redessiner la carte du monde, en bénéficiant à tous, mais surtout à la Chine : les financements chinois profitent en premier lieu à ses sociétés, et sont censés étendre son influence. 🌏
Cependant, l’OBOR suscite de nombreuses contestations, de nombreuses critiques chez ses partenaires : il fait notamment ressurgir le spectre de la crise de la dette, et même celui d’un “piège de la dette”, un piège néocolonialiste tendu par la RPC.
Alors que la BRI est censée répondre à ses intérêts, une telle crise, un tel piège, ne jouent pas en faveur de son influence, de son “soft power”.
Alors qu’elle souhaitait profiter du retrait américain sous Trump pour s’affirmer comme le nouveau leader mondial, la RPC suscite toujours autant de craintes. A l’heure où Biden marque la fin de l’isolationnisme américain, la Chine a peut-être raté le coche.
Mais elle a encore jusqu’à 2049 pour faire du XXIe siècle le “siècle chinois”. 🇨🇳
Excellent article résumant bien les différents avantages et inconvénient qu’apportent les nouvelles routes de la Soie. Cependant il est dommage que vous n’évoquiez pas les désavantages de ces routes de la Soie concernant l’UE