Tu es au lycée et tu étudies les conséquences de la découverte du « Nouveau Monde » ? À ce titre, ton prof d’histoire ou celui de français ont décidé de te faire étudier le roman La Controverse de Valladolid de Jean-Claude Carrière ? Peut-être que tu as vu le film en cours avec Jean-Pierre Marielle et que tu veux en savoir davantage sur ce grand débat du XVIe siècle et ses conséquences ? Pose-toi un instant, cet article est fait pour toi ! On te dit tout ce qu’il faut savoir sur la controverse de Valladolid pour que tu assures en cours. Tu es prêt ? C’est parti ! 🚀
Qu’est-ce que la controverse de Valladolid ? 👀
C’est quoi une controverse ? 💥
C’est un débat intense et souvent un peu chaud entre plusieurs personnes qui ont des points de vue hyper différents sur un sujet précis.
Bref, c’est un conflit d’idées, une véritable bataille verbale ! On pourrait dire que c’est une sorte de spectacle où les gens qui s’affrontent utilisent des mots plutôt que des armes, chacun cherchant à convaincre le public que son opinion est la meilleure.
On te propose un petit tableau récapitulatif des infos principales parce qu’on est hyper sympas chez les Sherpas !
| La date du débat | Le débat a lieu entre le 15 août 1550 et le 4 mai 1551. |
| La forme du débat | Deux débats d’un mois chacun et des lettres échangées. |
| Le lieu | Le collège San Gregorio à l’université de Valladolid. |
| Les organisateurs du débat | Charles Quint et le pape Jules III |
| Le sujet du débat | La manière dont doivent se dérouler les conquêtes du Nouveau Monde. Est-ce qu’il existe un « droit de conquête » pour justifier le travail et la conversion forcés des Indiens ? Est-ce que la colonisation est légitime ? |
| Les principaux opposants | Le débat rassemble des juristes, des théologiens et des hommes politiques. Les principaux opposants du débat sont Juan Ginès de Sepúlveda et Bartolomeo de Las Casas. |
Le contexte historique
La controverse de Valladolid, c’est quoi ? Ça se passe sous le règne de Charles Quint, à l’époque de la conquête du Nouveau Monde, en pleine période de la Renaissance. L’empire colonial espagnol est alors à son apogée : les conquistadors ont colonisé les Caraïbes, puis progressivement, le Mexique et le Pérou.
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Tu veux un super récit de la journée du 12 octobre 1492, date de l’arrivée de Christophe Colomb aux « Indes » ?
L’épisode « Ce jour-là au Nouveau Monde, trois navires en vue » est fait pour toi !
Déjà, la reine Isabelle de Castille (mamie du roi Charles), qui a donné beaucoup de thunes pour soutenir le voyage de Christophe Colomb (1492, TMTC !), était clairement opposée à l’esclavage des Indiens.
Quel est le problème ?
👉 C’est un vaste territoire là-bas, c’est loin aussi, et en Espagne, ils ne peuvent pas tout contrôler.
Les conquistadors ont rapidement tendance à voler les terres des indigènes, les faire travailler de force, les maltraiter (voire pire !).
Des gens vont quand même se rebeller contre cette barbarie et des lois vont être mises en place mais, comme l’Europe, c’est loin, les colons espagnols sont libres de faire ce qu’ils veulent.
👉 Parmi les grands défenseurs de la condition des populations autochtones (les Amérindiens, quoi !), il y a Bartolomeo de Las Casas, un type cool, homme d’Église, nommé « défenseur des Indiens » en 1516 et qui dénonce les pratiques abusives et brutales des Espagnols.
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Tu veux en savoir davantage sur Las Casas ?
France Culture propose un podcast fantastique à son sujet intitulé « Bartolomé de Las Casas/Cahiers Leiris ».
Et c’est grâce à des gens comme lui que Charles Quint et les papes de l’époque, Paul III et Jules III, vont serrer la vis :
📜 en 1537, le Paul III condamne l’esclavage des Indiens : ce sont des êtres humains et ils ont droit à la liberté (nooon, c’est vrai ?) ;
📜 en 1542, le roi d’Espagne promulgue les Leyes Nuevas : les Amérindiens sont placés sous la protection de la Couronne d’Espagne et demandent aux pays conquis de sévir contre les abus.
👉 Il y a des gens en faveur de la colonisation et il y a des gens qui sont contre. Charles Quint ne sait plus trop qui écouter, croire et penser.
En 1550, il décide de suspendre la colonisation et d’organiser un débat formel pour savoir si c’est ok de conquérir les terres des autres et les forcer à se convertir à la religion catholique, si les Indiens sont libres et légitimes propriétaires de leurs territoires (on te spoile direct, oui, en fait !).
👉 C’est le début de la controverse de Valladolid.
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Psst, à la même période, partout en Europe, c’est l’apogée de l’humanisme, ce grand courant intellectuel, littéraire et artistique !
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Les arguments en faveur de la colonisation et de l’esclavage
Ce point de vue est défendu par Juan Ginés de Sepúlveda. Selon lui, la conquête et l’évangélisation des peuples d’Amérique sont une nécessité.
Sa bio en bref ⏩
- il a traduit la Politique d’Aristote (hyper important à savoir pour la suite),
- il a combattu les théories d’Erasme, et les thèses de Luther (Réforme protestante),
- il a écrit plein de livres sur des sujets variés,
- il est devenu historiographe de Charles Quint (chargé d’écrire son histoire).
Voici les différents arguments de Sepúlveda :
🗣️ une hiérarchie des civilisations : selon le théologien, les conquêtes réalisées par l’Espagne dans le « Nouveau Monde » sont justes et légitimes car les Indiens sont considérés comme des esclaves naturellement soumis à la domination des Espagnols. Sepúlveda reprend ainsi le discours d’Aristote qui affirme que certains individus sont destinés à être esclaves en raison de leur nature inférieure ;
🗣️ la responsabilité des Européens : Sepúlveda soutient que certaines sociétés sont naturellement destinées à dominer d’autres en raison de leur supériorité intellectuelle et morale. Les Espagnols, plus civilisés, ont la responsabilité de gouverner les peuples indigènes pour les éduquer, les civiliser et leur enseigner « des modes de vie justes et sains » ;
🗣️ des pratiques choquantes dénoncées : le théologien justifie leur infériorité en condamnant leurs pratiques culturelles (le cannibalisme, l’inceste et les sacrifices notamment) qu’il associe à de la cruauté et de la barbarie ;
🗣️ les sauver par le baptême : Sepúlveda avance l’idée que la conversion des Indiens d’Amérique au christianisme doit être imposée par la force, pour leur propre bien. Il s’agit de sauver leurs âmes, du moins celles des victimes de sacrifices, même si cela implique la violence.
Les arguments en faveur des droits des populations autochtones
Face à Sepúlveda, il y a le contre-argumentaire de Bartolomé de Las Casas :
-
la cruauté présente dans toutes les civilisations : les coutumes des Indiens ne sont plus barbares que celles commises par des civilisations européennes anciennes comme les Romains ou même l’Espagne. Les Indiens doivent apprendre la morale et non y être contraints ;
-
le droit naturel des Indiens : Las Casas soutient que les peuples d’Amérique ont des droits naturels (la conversion par exemple) et doivent être traités avec dignité en tant qu’êtres humains. Il rejette l’idée que les Européens ont un droit naturel à la domination qui serait dû à leur supériorité ;
-
une conversion pacifique : Las Casas et Sepúlveda sont d’accord concernant la conversion pour sauver les âmes des Indiens car ils restent persuadés que leur religion est la seule et unique possible. Contrairement à Sepúlveda, Las Casas croit en la conversions par des moyens pacifiques. Il pense que la propagation de la foi chrétienne doit être fondée sur la persuasion et l’exemple plutôt que la violence ;
-
l’opposition à l’esclavage : Las Casas s’oppose à l’esclavage et plaide en faveur de l’abolition. Il défend le recours à des travailleurs libres plutôt qu’à des esclaves pour le développement des colonies.
-
la reconnaissance de la dignité : le moine souligne que les Indiens sont des êtres humains dignes de respect. Ils ne doivent pas être traités comme des biens ou des marchandises. Il cherche à établir un modèle de coexistence pacifique et respectueuse entre cultures.
Qui a gagné ?
Il n’y a pas eu de « gagnant », chacun étant persuadé d’avoir remporté le débat. La controverse s’est terminée sans qu’un verdict soit rendu.
Cependant, les idées de Bartolomé de Las Casas ont influencé Charles Quint et la politique coloniale espagnole. Malgré le débat, les abus contre les Indiens ont persisté encore pas mal de temps…
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La Controverse de Valladolid : l’oeuvre 3 en 1 de Jean-Claude Carrière 🎥
👉 À l’occasion du 500e anniversaire de la découverte de l’Amérique, l’auteur est invité à écrire un scénario pour un téléfilm diffusé sur FR3 (l’ancien France 3).
Il décide alors réécrire la controverse en un grand débat se déroulant sur trois journées, opposant Las Casas et Sepúlveda, à l’université de Valladolid, à partir d’éléments historiques réels.
| Titre | La Controverse de Valladolid |
| Réalisateur | Jean-Daniel Verhaeghe |
| Scénariste | Jean-Claude Carrière |
| Acteurs principaux | Jean-Pierre Marielle (Bartolomé de Las Casas) Jean-Louis Trintignant (Juan Ginés de Sepúlveda) Jean Carmet (le cardinal Roncieri, le légat du pape) |
| Récompenses | Quatre 7 d’or (ancienne récompense de la télévision française) |
La grande différence entre le téléfilm et la réalité
Dans le film, Las Casas et Sepúlveda doivent débattre à propos de l’humanité des peuples du « Nouveau Monde » : « Les Indiens ont-ils une âme ? ». Si la réponse est positive, l’esclavage sera interdit et si, au contraire, elle est négative, alors cela reviendrait à l’approuver sans aucun remord.
Or, dans la réalité, la question avait déjà été réglée dès la fin du XVe siècle après les voyages de Christophe Colomb, par la reine Isabelle de Castille et, plus tard, par le pape Jules III.
Le caractère des deux principaux protagonistes et développée :
🚹 Sepúlveda est un théologien méthodique et organisé. C’est aussi un grand orateur qui manie l’art de la rhétorique ;
🚹 Las Casas propose des exemples concrets à partir de situations qu’il a réellement vécues et qu’il dénonce. Il est dans l’affect, et cherche à persuader son auditoire. Pour étayer son argumentation, il va même jusqu’à faire venir une famille d’Indiens (un homme, une femme et leur enfant).
Ah oui, il faut noter que ce cher Juan Ginès de Sepúlveda (l’homme réel comme fictif) n’est jamais allé dans les colonies ! Il est resté bien au chaud en Espagne, se contentant de lire les récits des autres pour faire ses propres conclusions.
Pour anéantir des coutumes que nous appelons barbares, nous nous sommes faits plus barbares encore !
Bartolomé de Las Casas
👉 La fin du film
Contrairement à l’histoire, le légat du pape, après avoir écouté les deux hommes, prend un décision. Il se range du côté de Las Casas, les Indiens possèdent bien une âme (ouf !). Cependant, cela entraîne des répercussions économiques car si les Indiens sont humains… les réduire en esclavage n’est plus envisageable.
Par contre, dans le film, les Africains sont considérés comme ayant moins d’âme que les Indiens… (gloups !), Ce qui laisse supposer que la controverse est à l’origine du commerce triangulaire (les esclaves Africains seront vendus pour travailler dans les plantations du « Nouveau Monde »).
Fun fact 📚
C’est assez rare pour être souligné : le livre publié en 1993 est une adaptation du téléfilm de 1992, et non le contraire ! Le scénario avait été écrit dans l’optique d’une adaptation romanesque et dramatique (pour le théâtre).
La pièce sera représentée pour la première fois le 20 janvier 1999 au Théâtre de l’Atelier à Paris dans une mise en scène de Jacques Lassalle.
À lire aussi
Si le sujet t’intéresse, on te conseille un article hyper intéressant, publié aux Presses universitaires de Rennes, qui s’appelle « L’autre controverse de Valladolid » de Pierre Antoine Fabre. C’est hyper pointu mais si tu es fan de cette époque-là, c’est fait pour toi !
Voilà, tu connais désormais les infos indispensables pour comprendre ce qu’est la controverse de Valladolid, entre réalité et fiction. On espère que cet article t’a plu, n’hésite pas à nous laisser un commentaire pour nous exprimer ton point de vue sur le roman, le film ou la pièce de théâtre de J.-C. Carrière ! À bientôt, sur le site des Sherpas ! 😎
