Passionnante et regorgeant de profondeur, la notion d’inconscient est sujette Ă de nombreuses Ă©tudes, notamment avec le dĂ©veloppement de pratiques mĂ©dicales en tout genre et de la psychanalyse plus spĂ©cifiquement. Elle permet de dĂ©chiffrer au mieux ce qui se passe dans notre corps, dans la vie psychique en particulier đ§ ; et de tenter de donner une explication Ă ce qui est Ă l’origine de nos actes, choix et pensĂ©es que l’on pourrait trouver totalement rĂ©flĂ©chis.
Mais quâest-ce que l’inconscient en philosophie ? Comment et Ă travers qui a Ă©mergĂ© la notion d’inconscient en philosophie ? Comment cette derniĂšre est-elle devenue une des prĂ©occupations principales des intellectuels dans le champ des sciences humaines et cognitives depuis le dĂ©but du XXe siĂšcle ?
Pour mieux digĂ©rer ce que tu as appris Ă ce sujet lors de ton cours de philo (ou bon nombre dâĂ©lĂšves avouent sây endormir âŠđŽ ), et pour te montrer Ă quel point l’ĂȘtre humain est aussi complexe que fascinant, que dirais-tu dâun article en guise de fiche te rĂ©sumant le cours sur l’inconscient en philosophie ? (Surtout si tu as pour projet de tout tuer lors du bac đȘ !)
DĂ©finir lâinconscient en philosophie
Lâinconscient en philosophie est dĂ©signĂ© comme Ă©tant constituĂ© Ă la fois des pensĂ©es, dĂ©sirs ou pulsions refoulĂ©(e)s hors de la conscience durant toute la vie de l’Homme, et de lâensemble des forces logĂ©s dans l’esprit qui refoulent ces dĂ©sirs et les maintiennent dans lâinconscient, câest-Ă -dire hors dâatteinte de la conscience de l’Homme.
đĄ NB : Lâinconscient nâest pas initialement une thĂ©matique trouvant ses ancrages dans le monde philosophique. En effet, avant dâĂȘtre abordĂ© en philosophie, lâĂ©tude de lâinconscient a d’abord Ă©tĂ© pensĂ©e dans le domaine des neurosciences, centrĂ© sur la vie psychique.
La dĂ©finition de l’inconscient et de la vie psychique par Freud
Avec un prĂ©nom hors du commun, mais un nom ayant marquĂ© lâhistoire des neurosciences, Sigmund Freud, clinicien allemand Ă l’origine, a permis Ă l’« inconscient » de devenir un terme servant Ă dĂ©signer une partie du psychisme qui nâest pas directement accessible Ă la conscience.
Avant lâapport de la thĂ©orie de Freud, ce terme Ă©tait Ă l’origine un adjectif dĂ©signant ce qui nâest pas conscient sur le plan psychologique ou moral (ou un tiers qui n’avait pas conscience de la gravitĂ© de ses actes et les consĂ©quences associĂ©es par exemple).
Freud a eu le dĂ©sir de revendiquer son hypothĂšse comme la seule Ă©tant nĂ©cessaire et lĂ©gitime par rapport Ă dâautres (en espĂ©rant que ses chevilles ne soient pas trop gonflĂ©esâŠđ) car les donnĂ©es de la conscience sont lacunaires. De plus, cette explication permettrait davantage de donner un sens Ă des actes et pensĂ©es perçus comme incomprĂ©hensibles (lapsus, tics…).
Close-up sur la psychanalyse, science-clĂ© permettant dâexplorer lâinconscient
De quel constat de Freud est nĂ© la psychanalyse ? đ€
Freud, dans sa fonction de clinicien Ă l’origine, constate que certains patients s’adonnent Ă des actes dĂ©passant l’entendement, sans pour autant prĂ©senter de failles au niveau biologique. Il a donc eu le dĂ©sir de chercher une explication Ă ce phĂ©nomĂšne. La source privilĂ©giĂ©e pour expliquer ces comportements psychiques atypiques et mieux prendre connaissance de ce qu’il se passe dans leur fort intĂ©rieur se trouve dans le psychisme selon lui, comme il explique dans son texte Leçons d’Introduction Ă la psychanalyse.
La psychanalyse, dĂ©veloppĂ©e par ce dernier au dĂ©but du XXe siĂšcle, est alors la science ayant pour projet de faire en sorte que l’humain prenne connaissance de lui-mĂȘme et de son corps et de son esprit, en rendant conscient ce qui ne l’est pas.
A force d’expĂ©riences, elle permet donc de ramener dans le champ de la conscience les dĂ©sirs et autres Ă©lĂ©ments mal refoulĂ©s qui continuent Ă faire souffrir le sujet Ă force d’exercices (vous devez sĂ»rement avoir Ă l’esprit les patients allongĂ©s sur un divan, racontant leurs expĂ©riences passĂ©es de façon mĂ©lancolique avec un mur tissĂ© en fond… đ).
đĄNB : Freud n’est Ă©videmment pas le seul Ă avoir eu l’idĂ©e d’Ă©tudier l’inconscient en philosophie. Leibniz, philosophe allemand Ă©galement, fait partie des premiers philosophes ayant fait le choix de se pencher sur ce phĂ©nomĂšne.
Ce dernier va dĂ©peindre l’inconscient comme une faille de la conscience, et va tout comme Freud trouver cette derniĂšre lacunaire, ne pouvant pas dĂ©chiffrer toutes les perceptions venant Ă elle. Leibniz, dans son texte Nouveaux essais sur lâentendement humain nomme ces perceptions des « perceptions inconscientes » (quelle surprise… đ¶!)
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Quelques concepts relatifs Ă lâinconscient en philosophie
Le refoulement
Chez tous les ĂȘtres humains surgissent des pulsions agressives (comme lâenvie dâaller en dĂ©coudre avec tes voisins qui fĂȘtent des anniversaires tous les samedis avec de la musique Ă fond đĄ), voire mĂȘme des dĂ©sirs considĂ©rĂ©s comme immoraux, dĂ©passant la raison. Ces dĂ©sirs, entrant en contradiction avec la vie en sociĂ©tĂ© et le monde qui entoure le sujet, se voient refoulĂ©s ; notamment avec lâĂ©ducation.
Les explications philosophiques qu’offre le concept du refoulement admettent communĂ©ment que ce processus est une condition de la civilisation, cette derniĂšre qui cadre nos agissements et gĂšre les effets de certaines frustrations (comme le fait de ne pas pouvoir en dĂ©coudre avec tes voisins đ), de sorte Ă ne pas crĂ©er le chaos.
Imagine une seconde que l’humain laisse en libertĂ©, toute sa vie, ses envies dangereuses et/ou immorales refoulĂ©es… (bien que faisant partie de sa nature selon certains philosophes).
La vie en sociĂ©tĂ© ressemblerait en permanence Ă celle prĂ©sentĂ©e dans American Horror Story, et je ne pense quâaucun de nous voudrait en arriver lĂ , pas vrai đź ? (MĂȘme si, pour les amateurs de frissons extrĂȘmes, ce serait une expĂ©rience de rĂȘve đ!)
đĄ NB: Le refoulement retient la pulsion dans l’inconscient, mais ne l’anĂ©antit pas pour autant.
La notion du « ça, moi et surmoi »
Tu n’as peut-ĂȘtre aucune idĂ©e de ce que ces derniers mots signifient đŹ ⊠Mais laisse-moi t’expliquer clairement ce concept qui offre une explication bien plus imagĂ©e que celle proposĂ©e plus haut, et une connaissance plus accrue de ce qui compose l’inconscient !
Le « ça » dĂ©signe l’ensemble des dĂ©sirs refoulĂ©s et des pulsions instinctives inconscientes chez l’Homme, cherchant Ă se satisfaire au cours de la vie humaine. Il est rĂ©gi par le principe de plaisir qui pousse le sujet Ă satisfaire immĂ©diatement ses pulsions, en toute libertĂ©. Il reprĂ©sente l’inconscient et notre instinct  »primitif » contenu dans ce dernier.
ReprĂ©sentant Ă©galement l’inconscient, le « surmoi » est l’instance de censure, principalement issue de lâinfluence Ă©ducative parentale (et/ou) religieuse avec Dieu. Il tient le ââmoiââ dans une dĂ©pendance et exerce une pression constante sur lui, pour ne pas qu’il s’abandonne Ă ses pensĂ©es issues du  »ça » ; c’est une forme d’auto-censure facilitant la vie en sociĂ©tĂ©.
Le « moi » quant Ă lui est la pensĂ©e consciente rĂ©gie par le principe de rĂ©alitĂ© et/ou de raison poussant le sujet Ă remettre Ă plus tard la volontĂ© de libertĂ© du ââçaââ afin de ne pas entrer en contradiction avec les exigences du monde extĂ©rieur (comme expliquĂ© en amont avec le refoulement). Nos choix de la vie quotidienne et que nous exĂ©cutons de façon plus ou moins automatique, sont en grande partie l’effet de ce principe.
Lâinconscient en philosophie : entre apprĂ©hensions et critiques
MalgrĂ© le fait que la philosophie se soit emparĂ© de lâinconscient comme un de ses champs dâĂ©tudes, nombreuses ont Ă©tĂ© les critiques faites Ă cette thĂ©orie parmi les philosophes.
Une incertitude scientifique et une création du psychanalyste ?
Selon de nombreux philosophes, il n’existe pas de preuve de l’existence de l’inconscient, contrairement Ă ce qu’affirme Freud. En effet, ce dernier croyait prouver la lĂ©gitimitĂ© de son hypothĂšse grĂące aux guĂ©risons constatĂ©es lors des cures. Cette hypothĂšse chantant les louanges de la psychanalyse ne peut alors ĂȘtre Ă©tablie que de maniĂšre expĂ©rimentale, et non concrĂšte.
Karl Popper, philosophe des sciences, va mĂȘme plus loin dans la critique de la psychanalyse Ă travers ses textes : les certitudes scientifiques n’Ă©tant pas absolues dans le domaine expĂ©rimental, il dĂ©peint la psychanalyse comme une  »pseudo-science ». (Freud en sueur đ).
Lâinconscient en philosophie offre-t-il une excuse pour fuir nos responsabilitĂ©s ?
L’inconscient en philosophie est aussi vu comme une notion permettant d’attĂ©nuer les impacts de nos actions individuelles. (Par exemple, quelqu’un qu’on excusera d’avoir des propos ou actes dĂ©placĂ©s commis « inconsciemment»)
Jean-Paul Sartre Ă©met de pertinentes critiques vis-Ă -vis du concept d’inconscient en philosophie. Selon le philosophe et Ă©crivain français du milieu du XXe siĂšcle, l’humain fait preuve de  »mauvaise foi » (concept clĂ© dans les textes de Sartre) en invoquant l’Inconscient comme excuse pour fuir sa rĂ©alitĂ© et sa responsabilitĂ©. Par exemple, celui qui dit souffrir d’un complexe d’infĂ©rioritĂ© Ă©tant dĂ» Ă son inconscient aurait, pour Sartre, lui-mĂȘme fait le choix de ce positionnement vis-Ă -vis autrui dans sa relation avec lui.
Freud et ses successeurs, en ayant pour projet d’explorer l’inconscient, apaiseraient selon Sartre lâeffet des actions d’individus plus ou moins dĂ©sĂ©quilibrĂ©s. Vous le trouvez dur ? Vous ne faites pas fausse route.
La prise de responsabilitĂ© est selon lui un exercice que l’Homme doit faire en permanence, pour prendre pleinement connaissance de lui mĂȘme, et pour qu’il puisse enfin jouir d’une certaine libertĂ©.
Je pense que (si tu suis attentivement tes cours de philosophie đ ) tu as dĂ©jĂ entendu parler de Sartre. Ce dernier est connu Ă l’origine comme Ă©tant un philosophe trĂšs critique invoquant dans ses textes la responsabilitĂ© de l’humain dans tout ce qu’il entreprend dans sa vie.
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Bonus – nos ressources pour rĂ©viser
Exemples de sujets du bac sur lâinconscient en philosophie
(Nous te proposons aussi des mini-plans pour que tu puisses par la suite faire des exercices de composition !)
« Sommes-nous gouvernés par notre inconscient ? »
I. L’inconscient rĂ©git nos actes du quotidien (lapsus, tic, actes manquĂ©s)
II. L’humain a une marge de manĆuvre et une agentivitĂ© (Mobiliser Sartre comme dĂ©fenseur de la prise de responsabilitĂ©)
III. La conscience prend-elle le dessus ?
« L’inconscient existe-t-il ? »
Cette problĂ©matique reprend Ă peu prĂšs le plan de l’article, voici un exemple de plan permettant d’y rĂ©pondre :
I. Une hypothĂšse freudienne
II. Un fantasme des psychanalystes ? (en Ă©voquant Karl Popper, Descartes, Sartre…)
III. Des avancĂ©s scientifiques actuelles (parler de l’exactitude ou non de la thĂšse de l’inconscient Ă l’aide de recherches actuelles plus appuyĂ©es).
Ă lire aussi
â  Voici un article pour t’aider Ă mieux travailler en philosophie : [Philosophie] 10 façons de la travailler au lycĂ©e đ±
Ćuvres, textes et citations sur l’inconscient en philosophie (pour plus de contenu sur ta copie du bac !)
- « Au fond, personne ne croit Ă sa propre mort, et dans son inconscient, chacun est persuadĂ© de son immortalitĂ©. » – Sigmund Freud
- « L’inconscient se venge la nuit. » – Louis Scutenaire
- Leçons d’introduction Ă la psychanalyse, Livre de Sigmund Freud, 1917.
- Kieft, Xavier. Le problĂšme de l’inconscient selon Descartes , Revue philosophique de la France et de l’Ă©tranger, vol. 132, no. 3, 2007, pp. 307-321.
Conclusion sur lâinconscient en philosophie
Bien que faisant face Ă plus d’une critique et remis en question, l’inconscient en philosophie ne cesse d’Ă©pater et de soulever une grande curiositĂ© quant Ă nos failles, notre esprit, ou encore notre complexitĂ© en tant qu'(incroyables) ĂȘtres humains, et la maniĂšre dont on se comporte au quotidien.
Elle peut Ă©galement permettre d’explorer au mieux ce qui habite certaines personnes reprĂ©sentant parfois un danger pour notre sociĂ©tĂ© (retracer la vie et les traumas de tueurs en sĂ©rie Ă l’aide de la psychanalyse par exemple), ou ce qui poussent chacun d’entre nous Ă s’adonner Ă des actes manquĂ©s quelconques.