À retenir :
- L'État joue un rôle crucial dans la gestion des biens publics et communs, car le marché échoue souvent à les gérer efficacement en raison de phénomènes tels que le passager clandestin et la surexploitation.
- Les biens publics se caractérisent par la non-rivalité et la non-exclusion, tandis que les biens communs sont rivaux mais difficiles à exclure, nécessitant une régulation pour éviter leur épuisement.
- L'intervention de l'État assure une utilité collective durable et protège le patrimoine commun par diverses actions comme la production publique, la réglementation et l'imposition de quotas.
- Malgré son efficacité, l'intervention étatique doit surmonter des défis tels que le besoin de moyens adéquats et l'importance d'une gouvernance flexible incluant la participation citoyenne pour une gestion optimale.
Comment distinguer biens publics, biens communs et défaillances du marché ?
Précisons quelques notions clés. Un bien public présente deux propriétés essentielles : non-rivalité (la consommation par une personne ne diminue pas celle des autres) et non-exclusion (impossibilité d'écarter quelqu'un de sa consommation). Les biens communs sont rivaux (leur usage limite celui des autres), mais restent difficilement exclusifs. Par exemple, l'éclairage public et la justice illustrent les premiers ; les ressources halieutiques (poissons dans la mer), l'eau ou l'air relèvent des seconds.
Comprendre l'organisation de ces catégories implique également de saisir la classification des biens et des marchés. Le marché, organisé autour du prix et du profit, gère mal ces catégories de biens. On parle alors de défaillance du marché : ni fixation efficace du tarif, ni allocation optimale de la ressource n'apparaissent. Cela engendre souvent sous-production ou surexploitation, empêchant la satisfaction de l'utilité collective.
Quels mécanismes de marché échouent pour les biens publics ?
Prenons le cas de l'installation d'un éclairage nocturne dans une ville. Si seuls les bénéficiaires directs devaient payer, qui accepterait de financer ce service accessible à tous gratuitement grâce au paiement d'autrui ? Ce comportement correspond au phénomène du passager clandestin. À cause de la non-exclusivité, aucun acteur privé n'a intérêt à fournir ce bien.
L'Insee rapporte que les dépenses publiques consacrées aux biens publics essentiels, comme la sécurité et l'éducation, représentaient près de 15% du PIB français en 2022 (Insee, Comptes nationaux). Ces chiffres démontrent l'importance de l'intervention étatique pour garantir ces services collectifs.
En quoi consiste la tragédie des biens communs ?
La notion de tragédie des communs (Hardin, Science, 1968) décrit le risque inhérent aux biens communs : sans régulation, chaque individu exploite la ressource partagée jusqu'à son épuisement. La difficulté d'exclure physiquement quiconque accentue cette tendance.
Ce phénomène apparaît clairement lors des épisodes de surpêche. Entre 2010 et 2020, certaines zones côtières atlantiques françaises ont vu leur population de poissons traditionnels chuter de plus de 30%, menaçant des filières entières (Ifremer, État des pêches 2021). L'absence de régulation adaptée explique largement cette évolution préoccupante.
Pourquoi l'intervention de l'État devient-elle indispensable ?
Dès lors que la concurrence entraîne inefficacité ou injustice, la justification économique de l'intervention de l'État s'impose. L'État peut produire lui-même le bien, réglementer son utilisation ou inciter à certains comportements via fiscalité ou législation.
Par son action, l'État limite la défaillance du marché, assure une utilité collective durable et protège le patrimoine commun. Prenez l'exemple des vaccins : leurs effets positifs dépassent la sphère individuelle et bénéficient à toute la société, générant ainsi une externalité positive. Le financement public des campagnes vaccinales répond à un objectif d'intérêt général, non à une simple rentabilité privée.
Quelles formes peut prendre l'action de l'État ?
Selon la nature de la ressource, l'action publique varie. Pour les biens publics purs (éclairage, armée), l'État produit ou finance directement. Pour les biens communs (forêts, eau douce), il instaure quotas, règlements, permis ou droits d'usage collectifs. Les données récentes soulignent l'ampleur de ce rôle :
- Prélèvements fiscaux environnementaux : 49,5 milliards d'euros perçus en France en 2022 (Eurostat, 2023)
- Aires marines protégées : extension à 33% du territoire marin français début 2024 (Ministère de la transition écologique, 2024)
Ces exemples montrent comment l'action publique vise à préserver l'utilité collective et à prévenir les abus liés à la non-exclusion ou à la rivalité des ressources.
Quels défis pose encore la gestion publique des biens collectifs ?
Même avec l'intervention de l'État, il faut arbitrer entre préservation du patrimoine commun, équité d'accès et efficacité économique. Parfois, la gestion centralisée manque de moyens ou d'informations. Une implication citoyenne organisée améliore souvent la gouvernance. Plusieurs chercheurs, dont Ostrom (Governing the Commons, 1990), ont mis en avant l'efficacité de gestions locales encadrées, combinant règles partagées et contrôle collectif.
Comment faire évoluer la protection de ces ressources face à la mondialisation ? La biodiversité, stable localement mais menacée globalement, interroge la portée des politiques nationales — une réflexion à approfondir.
Erreurs fréquentes à éviter
Certaines confusions persistent sur la nature des ressources collectives : assimiler bien public et bien commun revient à ignorer leurs différences structurelles. L'éclairage public diffère fondamentalement d'une plage non surveillée quant à l'accès ou à l'épuisement possible.
- Confondre non-rivalité et non-exclusion (un bien peut être non-excluable mais rival)
- Penser qu'un financement privé suffit là où le passager clandestin domine
- Oublier la dimension internationale pour des biens comme le climat ou les océans
Gardez à l'esprit que toute intervention de l'État ne résout pas magiquement tous les problèmes : elle requiert des moyens, un contrôle rigoureux et la coopération pour atteindre l'utilité collective réelle.
| Type de bien | Rivalité | Exclusivité | Action privilégiée |
|---|---|---|---|
| Bien public | Non-rival | Non-exclusif | Production publique ou collective |
| Bien commun | Rival | Non-exclusif | Régulation, quotas, droit d'usage collectif |
| Bien privé | Rival | Exclusif | Marché classique |







