À retenir :
- L'action publique pour la justice sociale s'appuie sur la redistribution, implication fiscale et prestations sociales pour diminuer les inégalités économiques.
- Les dispositifs de protection sociale et les services collectifs tels que l'éducation et la santé public visent à garantir l'égalité des chances pour tous.
- Des limites financières et des effets indésirables comme la trappe à inactivité réduisent l'efficacité de l'intervention étatique.
- Les défis structurels et dynamiques globales complexifient la lutte contre les inégalités, nécessitant une régulation internationale.
Quels sont les outils de l'action publique pour la justice sociale ?
Avant d'explorer les limites, examinons ensemble les principaux leviers utilisés par l'État pour favoriser la justice sociale. Vous connaissez probablement la redistribution, mais d'autres moyens complètent cet arsenal.
La redistribution et la fiscalité : lutter contre les inégalités
L'État agit d'abord via la redistribution : il transfère une partie des ressources des ménages les plus aisés vers les plus modestes. Ce mécanisme repose sur la fiscalité (impôts progressifs sur le revenu, taxe d'habitation, TVA) et les prestations sociales (allocations familiales, aides au logement).
En France, selon l'Insee, les transferts sociaux réduisent l'indice de Gini - indicateur des inégalités économiques et sociales - de 0,45 à 0,29 après redistribution en 2021 (Insee, Revenus et patrimoine des ménages, édition 2023). Cette action atténue les écarts de niveau de vie entre groupes sociaux.
Protection sociale et services collectifs
Un autre levier essentiel réside dans la protection sociale : assurances maladie, retraites, chômage. Ces dispositifs limitent les risques liés à la santé, à la vieillesse et à l'emploi. Les services collectifs comme l'école publique gratuite, les transports ou l'accès aux soins visent aussi à garantir l'égalité des opportunités.
En 2022, la France a consacré 32% de son PIB à la dépense sociale (Eurostat, Government expenditure on social protection, 2023), un des taux les plus élevés d'Europe.
Discrimination positive et lutte contre les discriminations
L'État adopte également des politiques spécifiques pour corriger certaines inégalités structurelles. La discrimination positive donne temporairement un avantage à certains groupes afin de compenser des désavantages de longue durée (exemple : quotas dans l'enseignement supérieur).
Des lois protègent aussi contre les discriminations liées au genre, à l'origine ou à la situation de handicap dans l'accès au travail, au logement ou à l'éducation.
Pourquoi l'intervention de l'État rencontre-t-elle des limites ?
Malgré ces efforts, pensez-vous que l'action de l'État suffise à rétablir l'équité ? Plusieurs facteurs nuisent à l'efficacité des instruments publics et on ne peut ignorer les limites de l'action pour la justice sociale.
Contrainte de financement et acceptabilité
L'augmentation du coût de la protection sociale pèse sur les finances publiques. Depuis quelques années, les prestations sociales augmentent alors que les recettes stagnent. En 2022, le déficit public atteignait 4,7% du PIB (Insee, Comptes nationaux, 2023). Face à cette crise de financement, il faut faire des arbitrages.
Une hausse de la fiscalité suscite souvent des résistances. Le mouvement des « gilets jaunes » illustre la difficulté d'augmenter la contribution fiscale sans contestation lorsque la population perçoit certaines taxes comme injustes.
Effets pervers et ciblage imparfait
Les transferts sociaux produisent parfois des effets indésirables. Par exemple, ils risquent de décourager la recherche d'emploi si leur retrait est trop pénalisant lors d'une reprise d'activité : c'est le phénomène de trappe à inactivité. Selon la DARES, le taux de pauvreté reste stable autour de 14% malgré la redistribution (DARES, Chiffres-clés 2023), preuve que certains publics échappent encore à la protection sociale.
Par ailleurs, les politiques de discrimination positive font parfois débat quant au mérite, ou génèrent des tensions entre groupes sociaux. Leur efficacité dépend du ciblage précis et du contexte local.
Quels autres défis freinent la justice sociale ?
L'action publique doit aussi composer avec des enjeux structurels profonds, enracinés dans la société elle-même.
Complexité croissante des dispositifs publics
L'accumulation des aides et dispositifs accroît la complexité administrative. Un tiers des allocataires potentiels ne touchent pas toutes leurs allocations faute de connaissance ou de démarches accomplies (Observatoire des non-recours, Baromètre 2023). Ce non-recours limite l'efficacité de la redistribution.
Cette multiplicité alourdit la gestion et rend la lisibilité difficile pour les usagers, notamment parmi ceux qui auraient le plus besoin de soutien.
Limites de l'État face aux dynamiques globales
La mondialisation et les mutations économiques accentuent les inégalités économiques et sociales, parfois hors de portée directe des gouvernements. Les délocalisations industrielles, la concurrence fiscale ou les flux migratoires compliquent l'action de l'État-nation.
Les marges de manœuvre nationales se réduisent ; de nouveaux outils supranationaux (régulation européenne, coopération internationale) deviennent nécessaires pour traiter des problèmes systémiques tels que l'évasion fiscale ou la précarisation de l'emploi.
- Redistribution et fiscalité diminuent les inégalités mais ne les suppriment pas totalement.
- La montée des dépenses sociales provoque des crises de financement régulières.
- La lutte contre les discriminations progresse, mais reste partielle dans la réalité quotidienne.
- Les services collectifs universels améliorent l'accès, mais n'agissent que lentement sur la mobilité sociale réelle.
| Pays | % du PIB |
|---|---|
| France | 32 |
| Allemagne | 27 |
| Italie | 28 |
| Suède | 27 |
Erreurs fréquentes :
- Penser que la redistribution efface totalement les inégalités économiques et sociales.
- Confondre justice sociale et égalité parfaite de conditions.
- Négliger les logiques de contournement ou de non-recours aux droits sociaux.
- Oublier que l'action publique dépend fortement des ressources disponibles et de l'acceptabilité politique.
À votre avis, comment concilier demain ambition de justice sociale et contraintes économiques ? Quels nouveaux leviers pourraient permettre de dépasser ces limites ?







