À retenir :
- La mesure des inégalités évalue la dispersion des revenus au sein d'une population pour comprendre la répartition des ressources.
- La courbe de Lorenz visualise la distribution des richesses en montrant la dissymétrie par rapport à l'égalité parfaite.
- Le coefficient de Gini exprime le degré de concentration des richesses par une valeur unique, facilitant la comparaison internationale.
- Les rapports interdéciles montrent l'écart de niveau de vie entre les extrêmes de la distribution, complétant l'analyse des inégalités.
Pourquoi parle-t-on de mesure des inégalités ?
Vous entendez souvent que « les inégalités augmentent », mais comment l'évaluer concrètement ? Mesurer les inégalités consiste à apprécier la dispersion des revenus ou du patrimoine au sein d'une population. Il s'agit alors de voir jusqu'où certaines personnes - par exemple le top 1% - concentrent une grande part des ressources. Des organismes comme l'Insee ou l'OCDE publient régulièrement des indicateurs permettant d'analyser ces écarts.
La mesure statique des inégalités correspond à une photographie à un moment donné, sans prendre en compte les parcours individuels sur la durée (mobilité sociale). Ces outils servent à comparer différentes sociétés ou à observer l'effet d'une réforme publique. Parmi eux, on trouve notamment le coefficient de Gini et le rapport interdécile, essentiels pour objectiver la structure des disparités.
La courbe de Lorenz : visualisation des répartitions
Comment représenter simplement qui possède quoi ? La courbe de Lorenz offre une visualisation graphique de la distribution d'une ressource (revenu, patrimoine), classant les individus du plus pauvre au plus riche. Elle ne se contente pas d'une moyenne : elle met en évidence la dissymétrie dans la société.
En expliquant la mesure des inégalités à travers des graphiques tels que la courbe de Lorenz, les chercheurs rendent visibles la distance à l'égalité parfaite. Cette capacité d'illustration facilite la compréhension des écarts sociaux et leur portée réelle.
En traçant la part cumulée de chaque segment de la population face à celle du revenu disponible détenu, cette courbe révèle la distance à l'égalité parfaite. Une diagonale à 45° symbolise l'égalité totale ; plus la courbe fléchit sous cette diagonale, plus la concentration des richesses est forte.
Lecture appliquée à la France
En 2021, selon l'Insee, la courbe de Lorenz montre que près de 50% des ménages cumulent environ 30% du revenu disponible total (Insee, Revenus et patrimoine des ménages, édition 2023). Ce chiffre illustre la concentration relative de la richesse nationale et invite à réfléchir aux effets de la fiscalité ou des transferts sociaux.
Limites de la courbe de Lorenz
La courbe de Lorenz reste avant tout visuelle. Elle n'apporte pas directement une valeur numérique synthétique pour comparer aisément différents contextes. C'est pourquoi le coefficient de Gini complète cet outil.
D'autres limites concernent son incapacité à montrer l'évolution temporelle ou l'effet précis de certains mécanismes redistributifs. D'autres indicateurs prennent alors le relais pour affiner l'analyse.
Le coefficient de Gini : mesurer la concentration
Le coefficient de Gini résume la dispersion observée avec la courbe de Lorenz en une seule valeur comprise entre 0 (égalité parfaite) et 1 (inégalité extrême). Plus ce score est faible, plus la société se rapproche de l'égalité.
Son calcul repose sur la comparaison de la surface entre la courbe de Lorenz réelle et la diagonale d'égalité parfaite, rapportée à la surface totale sous la diagonale. Un écart important signale une forte disparité des revenus ou patrimoines.
Comparaisons internationales chiffrées
En France, le coefficient de Gini du revenu disponible équivalisé atteint 0,29 en 2021 (Insee), contre 0,32 pour l'Union européenne (Eurostat, 2022). À titre de comparaison, la Suède affiche 0,27 et les États-Unis montent à 0,41 (OCDE, 2024).
| Pays | Coefficient de Gini (2022) |
|---|---|
| France | 0,29 |
| Suède | 0,27 |
| États-Unis | 0,41 |
| Union européenne | 0,32 |
Ce tableau donne un aperçu rapide de la dispersion internationale. On note que la composition du revenu disponible impacte significativement la comparaison des indices.
Points forts et limites
Le coefficient de Gini facilite les comparaisons internationales et historiques. Cependant, deux distributions très différentes peuvent aboutir à la même valeur, ce qui limite parfois sa portée analytique.
De plus, cet indice masque les variations spécifiques entre le bas et le haut de la pyramide sociale. D'autres outils, comme les rapports interdéciles, ciblent plus précisément les écarts entre groupes définis.
Les rapports interdéciles et inter-quantiles : appréhender l'écart entre groupes
L'écart entre les plus pauvres et les plus riches dépasse la simple moyenne : les rapports interdéciles (ou inter-quantiles) mettent en lumière la distance entre plusieurs tranches de la population. Le rapport D9/D1 compare le seuil du neuvième décile (D9) à celui du premier décile (D1), indiquant combien un ménage du haut gagne ou possède par rapport à ceux du bas.
En 2021, le rapport interdécile pour les revenus disponibles en France s'établit à 3,5 : les 10% les plus aisés disposent d'un niveau de vie 3,5 fois supérieur à celui des 10% les moins favorisés (Insee, 2023). L'étude des quantiles intermédiaires, comme le rapport interquartile, complète cette approche en opposant les 25% les plus riches aux 25% les plus pauvres.
Pertinence pour comparer le top 1%
On évoque souvent le top 1% pour illustrer la concentration extrême des richesses. Cette comparaison attire l'attention mais peut amplifier la perception de la dispersion, surtout lorsque ce groupe bénéficie de dynamiques financières très particulières.
Utilisation complémentaire des différents outils
Pour dresser un portrait nuancé des inégalités, il faut croiser coefficient de Gini, courbe de Lorenz et rapports inter-quantiles. Chacun éclaire une facette différente de la structure socio-économique et évite toute interprétation simpliste.
Il importe aussi d'analyser la part du revenu disponible captée par telle ou telle catégorie sociale afin de compléter ces mesures globales.
Erreurs fréquentes lors de la lecture des inégalités mesurées
Certains confondent inégalité absolue (différence brute) et inégalité relative, essentielle pour comprendre la hiérarchie réelle. Croire que seul le coefficient de Gini suffit à saisir la complexité des disparités constitue également une erreur classique.
Attention à l'interprétation isolée d'un ratio sans contexte international ou historique : une stabilité apparente du rapport interdécile ne garantit pas une mobilité sociale réelle, tout comme un Gini constant ne signifie pas que tous profitent également d'une croissance des revenus.
- Comparer toujours des groupes démographiques homogènes.
- Vérifier la source et la périodicité des données utilisées.
- Tenir compte des effets de seuils liés aux politiques publiques.
- Intégrer la notion de part du revenu disponible pour une analyse fine.
Ces outils vous semblent-ils suffisants pour penser la justice sociale ? Quels nouveaux indicateurs pourraient enrichir notre compréhension des inégalités demain ?







