À retenir :
- La délocalisation désigne le transfert d'activités vers des pays émergents pour réduire les coûts salariaux, suscitant débats sur son impact sur le chômage.
- Les chiffres montrent que la délocalisation n'explique qu'une part limitée des pertes d'emplois industriels, avec d'autres facteurs comme l'automatisation jouant un rôle majeur.
- Les secteurs tels que le textile et l'électronique sont plus exposés à la délocalisation, accentuant les inégalités sociales et territoriales.
- Outre la délocalisation, l'automatisation et le vieillissement de la population influencent profondément le marché du travail dans les pays développés.
Qu'est-ce que la délocalisation et pourquoi suscite-t-elle autant de débats ?
Vous avez sûrement entendu parler de délocalisation dans l'actualité. Ce terme désigne le transfert d'activités industrielles ou de services d'un pays développé vers un pays émergent où les coûts salariaux sont inférieurs. Les entreprises agissent ainsi pour améliorer leur compétitivité et réduire leurs dépenses de main-d'œuvre.
Ce choix conduit souvent à une suppression d'emplois dans les régions concernées. Selon l'Insee, entre 2006 et 2015, environ 13% des pertes nettes d'emplois industriels en France résultent directement de délocalisations (Insee, « Délocalisation et emploi industriel », 2018). Ces chiffres alimentent naturellement les débats sur le lien entre délocalisation et évolution du chômage.
L'impact de la délocalisation sur le chômage dans les pays développés
Combien d'emplois sont réellement concernés ?
Peut-on quantifier précisément les emplois touchés par la délocalisation ? Les études montrent que ce phénomène reste limité face à l'ensemble du marché du travail. En France, entre 2001 et 2019, moins de 5% des suppressions de postes industriels proviennent directement d'une délocalisation (DARES, « L'emploi industriel en France », 2022).
Afin de mieux comprendre l'enjeu, il convient également de s'intéresser à l'impact de la mondialisation sur l'emploi, qui recoupe celui des délocalisations mais englobe des transformations plus globales du marché du travail.
Aux États-Unis, seulement 20% des pertes d'emplois manufacturiers entre 1999 et 2011 s'expliquent par la concurrence accrue de la Chine (Autor, Dorn et Hanson, The China Shock, 2016). Ainsi, si la délocalisation a un impact réel, il demeure minoritaire comparé à d'autres facteurs comme l'automatisation ou le progrès technique.
Pourquoi certains secteurs et certaines populations sont-ils plus vulnérables ?
Le risque lié à la délocalisation n'est pas réparti uniformément. La pression sur les salaires concerne surtout les travailleurs peu qualifiés dont les tâches peuvent être facilement transférées. Les secteurs tels que le textile, l'électronique ou l'assemblage automobile subissent particulièrement la concurrence internationale.
D'après Eurostat, le taux de chômage des ouvriers non qualifiés progresse davantage dans les régions européennes ouvertes au commerce mondial depuis vingt ans (Eurostat, Marché du travail par secteur, 2023). Cela accentue les inégalités sociales et territoriales, car de nombreux salariés peinent à retrouver un emploi équivalent après une vague de délocalisations.
- Travailleurs du secteur textile : fortement exposés aux délocalisations depuis les années 1990
- Ouvriers peu qualifiés : difficultés à se reconvertir dans le tertiaire ou les services numériques
- Salariés des industries traditionnelles : régions anciennement industrielles confrontées à un recul de l'activité
Quelles autres causes principales expliquent le chômage dans les pays développés ?
L'automatisation et le progrès technique remodèlent l'emploi
Au-delà de la délocalisation, d'autres transformations majeures redessinent le marché du travail. Parmi elles, l'automatisation occupe une place centrale. Selon l'OCDE, jusqu'à 14% des emplois actuels pourraient disparaître sous l'effet de la robotisation et de l'intelligence artificielle, tandis que 32% des métiers devront évoluer (OCDE, « L'avenir du travail », 2019).
Dans l'industrie automobile, par exemple, l'usage grandissant de robots a fait grimper la productivité tout en réduisant le besoin de main-d'œuvre. Ce phénomène affecte aussi bien les pays développés que les pays émergents.
D'autres facteurs influent horizontalement sur le marché du travail
Le vieillissement de la population influe également sur le taux de chômage. Dans plusieurs pays européens, l'allongement de la durée de vie ralentit les entrées sur le marché du travail et modifie la structure sectorielle de l'emploi.
Le système éducatif, l'accès à la formation professionnelle et le dynamisme entrepreneurial jouent eux aussi un rôle important. En France, le taux de chômage structurel - incompressible malgré la croissance - oscille autour de 7% depuis plusieurs années (Banque de France, Statistiques sur le chômage, 2023).
| Facteur | % Suppressions d'emplois industriels (2010-2019) | Source |
|---|---|---|
| Délocalisation | 4,7% | DARES, 2022 |
| Automatisation | 22% | OCDE, 2019 |
| Changements de goût/demande | 12% | Insee, 2018 |
| Autres (restructurations, fermetures non délocalisées) | 61,3% | Compilation études diverses |
Erreurs fréquentes à propos du lien entre délocalisation et chômage
De nombreuses idées reçues circulent : certains pensent qu'à chaque fermeture d'usine correspond une délocalisation vers un pays émergent. Pourtant, la majorité des suppression d'emplois relève d'autres causes internes ou externes.
On surestime aussi souvent l'influence directe de la concurrence internationale sur tous les segments du marché du travail. Si l'industrie souffre, la plupart des économies avancées reposent aujourd'hui sur les services, bien moins faciles à transférer à l'étranger.
- Confondre suppression d'emplois et délocalisation systématique
- Sous-estimer l'importance de l'innovation et de la productivité
- Négliger la mobilité des travailleurs entre secteurs
Une analyse rigoureuse invite donc à replacer la délocalisation parmi l'ensemble des forces qui transforment continuellement le marché du travail.
Si la délocalisation contribue à la transformation du marché du travail, d'autres facteurs structurants pèsent tout autant sinon davantage sur le niveau du chômage dans les pays développés. Selon vous, comment ces différentes dynamiques pourraient-elles façonner l'évolution future de l'emploi ?







