Comment la socialisation et les liens sociaux façonnent-ils nos comportements, y compris déviants ?

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Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi certaines règles sociales paraissent naturelles à certains, mais sont transgressées par d'autres ? Face à une même norme, on observe des réactions variées : acceptation, adhésion, ou encore transgression des normes. Comment expliquer ces écarts de comportement au sein d'un même groupe ? Pour saisir ces différences, il s'agit d'analyser la manière dont la socialisation et les liens sociaux influencent chacun de nous. Plongeons ensemble dans les mécanismes à l'œuvre derrière ces variations de comportements.

À retenir :

  • La socialisation joue un rôle clé dans l'intégration des normes sociales dès l'enfance, influençant nos comportements tout au long de la vie.
  • Les comportements déviants se développent malgré la socialisation, influencés par des facteurs comme le contexte social, les influences des pairs, et les mécanismes de contrôle social.
  • Les liens sociaux forts réduisent la probabilité de transgression des normes, selon des études, mais les ruptures familiales ou scolaires accroissent ce risque.
  • L'évolution rapide des normes sociales, accélérée par les réseaux numériques, transforme notre compréhension de la déviance, obligeant le contrôle social à s'adapter.

Qu'est-ce que la socialisation et pourquoi impacte-t-elle nos façons d'agir ?

La socialisation recouvre l'ensemble des processus sociaux par lesquels une personne, dès l'enfance, apprend et intègre les valeurs et normes sociales en vigueur dans son environnement. Ces apprentissages structurent durablement notre façon de penser, de ressentir et d'agir. Par exemple, le fait de respecter une file d'attente ou de lever la main pour prendre la parole en classe relève de normes transmises très tôt.

La famille, puis l'école, le groupe de pairs, les médias ou le travail transmettent ce que la société considère comme acceptable ou valorisé. Comme l'indique Durkheim : « La société ne peut exister que si ses membres observent des similitudes essentielles » (Durkheim, De la division du travail social, 1893). Mais alors, comment comprendre la persistance de comportements déviants ?

Quels liens unissent socialisation et déviance ?

On parle de déviance lorsqu'un individu adopte des comportements qui s'écartent des normes attendues. La transgression des normes prend des sens multiples selon le contexte : fumer à l'adolescence symbolise parfois la rébellion, manifester pacifiquement traduit l'expression d'une opinion. Toute forme de déviance n'entraîne pas systématiquement une sanction lourde ni une stigmatisation sévère. Pour mieux approfondir cet aspect, intéressez-vous à l'étude des comportements sociaux.

Le contrôle social désigne l'ensemble des mécanismes destinés à faire respecter les normes. Il s'appuie sur les interactions sociales, qu'il soit formel (lois, règlements) ou informel (regards, moqueries, félicitations). Plus les liens sociaux entre individus se montrent forts, plus la pression à la conformité augmente, ce qui réduit en principe le risque de déviance, selon Travis Hirschi (Les causes de la délinquance, 1969).

Comment les liens sociaux influencent-ils la transgression des normes ?

Rôle du groupe et effet de pair

Les amis, collègues et cercles de proximité exercent souvent une influence déterminante sur nos choix. Selon l'INSEE, chez les 15-24 ans, l'appartenance à un groupe où au moins un membre transgresse accroît fortement la probabilité d'imiter ce comportement déviant (Enquête Santé Scolaire, 2023). Ce phénomène illustre la puissance du groupe de pairs dans la diffusion des comportements, qu'ils soient conformistes ou non.

Cette dynamique s'observe dans de nombreux domaines : réussite scolaire, adoption de modes vestimentaires, engagement associatif, etc. L'observation et la répétition permettent à chacun d'assimiler de nouvelles attentes ou codes, qu'ils soient légitimes ou contestés.

L'étiquetage : être défini par le regard des autres

Howard Becker développe la théorie de l'étiquetage : un comportement devient déviant lorsque la société le qualifie ainsi (« Outsiders », 1963). Une fois étiqueté, l'individu reçoit une nouvelle identité sociale, ce qui peut renforcer sa marginalisation.

Par exemple, un élève traité de « perturbateur » risque d'intérioriser ce statut et de multiplier les actes de désobéissance. Ce processus explique pourquoi tous ceux qui enfreignent les règles ne sont pas perçus ou traités de la même façon. L'impact du stigmate traduit la dimension construite du jugement porté sur la déviance.

Des données pour mieux comprendre les comportements déviants

Les statistiques illustrent combien les facteurs sociaux pèsent dans les parcours de déviance. Selon la Drees (2022), 6,8% des adolescents âgés de 11 à 17 ans déclarent avoir déjà commis un acte hors-la-loi, mais ce taux varie fortement selon le degré d'intégration familiale et scolaire.

Le rapport de l'Observatoire national de la délinquance (ONDRP, édition 2023) montre que la part des mineurs interpellés pour usage de stupéfiants atteint 23% dans les milieux marqués par des ruptures familiales, le chômage ou la précarité résidentielle. Cette donnée souligne combien des liens sociaux fragiles favorisent des conduites déviantes.

Facteur socialTaux de comportements déviants observés (%)
Intégration familiale forte3,1
Rupture familiale récente8,6
Difficulté scolaire importante12,7
Participation à des activités encadrées2,5

Quels sont les enjeux actuels du contrôle social et de la compréhension de la déviance ?

Normes en mutation et émergence de nouvelles formes de déviance

L'évolution rapide des sociétés modifie la nature, voire la légitimité, de certaines normes sociales. Des comportements déviants hier deviennent parfois acceptés aujourd'hui : le tatouage, autrefois mal vu, est désormais banalisé. Cette évolution met en lumière la dynamique permanente des représentations collectives.

Face à ces mutations, le contrôle social doit s'ajuster tout en préservant la cohésion du groupe. Les réseaux sociaux numériques accélèrent la visibilité des pratiques alternatives et renforcent certains phénomènes d'étiquetage.

Erreurs fréquentes autour de la déviance et des liens sociaux

  • Confondre la déviance avec la criminalité systématique : toute transgression des normes n'équivaut pas à une infraction pénale.
  • Penser que la socialisation garantit la conformité parfaite : même intégrés, les individus développent parfois des stratégies de contournement.
  • Sous-estimer l'influence du groupe de pairs sur l'apprentissage des comportements déviants ou conformistes.
  • Oublier que l'étiquetage contribue à amplifier certains comportements, au-delà même du fait originellement déviant.

Il reste essentiel de se rappeler que la socialisation se poursuit tout au long de la vie. Le cumul ou la rupture de certains liens sociaux joue un rôle majeur dans l'apparition ou l'atténuation des comportements déviants.

À votre avis, comment la transformation des liens sociaux à l'ère numérique va-t-elle modifier les frontières entre conformité et déviance dans les années à venir ?

Questions fréquentes sur la socialisation, la déviance et les liens sociaux 🔍

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